Comédie dramatique écrite et mise en scène par Grégoire Cuvier, avec Annick Brard, Jean-Marc Charrier, Christophe Chêne-Cailleteau, Marie Doreau, Lisa Leonardi, Mathilde Levesque et Marie-Anne Mestre. La Compagnie Théâtre de chair présente avec "Vestiges Fureur" une très réussie et inédite déclinaison de thèmes très, voire trop, récurrents en ces temps, ceux de la famille pathogène et du deuil, sur une stupéfiante partition de Grégoire Cuvier dont il assure également la mise en scène.
Dans un milieu bourgeois sclérosé et délétère où tout commence presque joyeusement par un réveillon de Noël, sorte de scène primale qui va se transformer en cauchemar, un père psychorigide et tyrannique (Jean-Marc Charrier), sa soeur (Annick Brard), une mère soumise (Marie-Anne Mestre), deux filles (Lisa Leonardi et Marie Doreau), un fils souffrant d'un léger déficit mental (Christophe Chêne-Cailleteau) et une cousine inconnue venue de nulle part (Mathilde Levesque) composent une famille qui va inéluctablement se désintégrer.
Grégoire Cuvier entreprend d'en relater l'histoire en s'affranchissant de la linéarité chronologique à laquelle il substitue une structure de scènes rétrospectives constituées des bouffes mnésiques de chaque personnage apparaissant dans une sorte de chambre d'écho, dont la structure dramaturgique n'est pas sans évoquer le procédé narratif de polyphonie des voix usité par la romancière Virginia Woolf .
Une délicate entreprise d'a-réalité qu'il parvient à rendre tangible dans l'espace mental conçu par Grégoire Faucheux, une grande table dinatoire et un paravent de miroirs piqués, et sous les lumières crépusculaires de Nicolas Faucheux.
S'y meuvent des ombres, des spectres, des ectoplasmes laminés par les secrets, les non-dits, les mensonges et les silences délivrant les morceaux d'un puzzle qui pourra, peut-être, ne jamais être reconstitué dans sa véracité objective. Grégoire Cuvier dirige efficacement des comédiens émérites qui, dans cette forme inhabituelle en rupture avec les codes ordinaires de la représentation, parviennent à une incarnation sensible de l'être dans la douleur. |