Fiston Mwanza Mujila
(Editions Métailié) septembre 2020
S’il est un ouvrage qui m’a sorti de ma zone de confort de lecture, c’est bien cette publication des éditions Métailié, cet ouvrage écrit par un auteur congolais, un certain Fiston Mwanza Mujila. Certes, le lecteur relativement assidu des publications de cette excellente maison d’éditions est habitué à voyager vers des contrées venant d’Afrique ou d’Amérique du Sud mais là je dois avouer que j’y ai trouvé une langue et un style d’écriture assez fascinant. Je savais que les éditions Métailié étaient capables de me surprendre avec leurs publications, elles y sont parvenues avec cet ouvrage.
Je ne connaissais pas Fiston Mwanza Mujila, cet auteur congolais qui enseigne la littérature africaine, qui écrit des poèmes et des pièces de théâtre et qui a déjà écrit un premier roman, Tram 83, livre qui a connu des critiques dithyrambiques et une moisson de prix prestigieux.
Je ne connais ni le Congo ni l’Angola mais je dois dire que la lecture de cet ouvrage m’a quand même rappelé l’ambiance que j’ai connue il y a quelques années lorsque je suis allé au Benin, un autre pays d’Afrique noire. Cotonou, sa capitale, s’apparentait à un lieu de foisonnement incroyable dans laquelle vivaient de la débrouille et du petit commerce des millions de personnes. J’y ai vu une population jeune et insouciante qui n’a pas le même rapport à la vie que nous occidentaux. L’Afrique est un continent vraiment à part dans le monde et je trouve que l’ouvrage de Fiston Mwanza Mujila prouve parfaitement cette affirmation.
Ce royaume de la débrouille, cette vie haute en couleur, c’est un peu l‘histoire de Sanza, un jeune exaspéré par la vie familiale, qui quitte ses parents pour rejoindre le parvis de la Poste, où vivent d’autres gamins de la rue. Commence alors pour lui la dolce vita, une vie de petits et grands larcins, des cinés avec Ngungi, l’enfant sorcier et des voyages en avion vers l’infra monde. Sa vie est aussi ponctuée de bagarres et de séances de vapeurs de colle qui finissent par le mettre sur la paille et l’obligent à céder au mystérieux Monsieur Guillaume et à sa police secrète.
Lubumbashi est une ville en plein chaos, on conspire dans les coins, on prend des trains pour nulle part, on se précipite dans l’Angola en guerre pour aller traquer le diamant sous la protection de la madone des mines, un écrivain autrichien se promène avec une valise pleine de phrases, le Congo devient Zaïre et le jeune Molakisi archevêque. Et la nuit, tous se retrouvent au "Mambo de la fête", là se croisent tous ceux qui aiment boire et danser ou montrer leur réussite et leur richesse. Là on se lance à corps perdu dans La Danse du Vilain.
Dire que l’auteur possède une imagination débordante est un doux euphémisme lorsque l’on termine son livre qui fait un peu plus de 270 pages. Le Zaïre qu’il nous décrit est un pays en plein chaos, au moment de la fin du règne de Mobutu quand l’Angola lui est en pleine guerre civile. L’histoire de ces trois enfants dans une zone frontalière entre le Zaïre et l’Angola (l’ouvrage débute d’ailleurs par une carte de ces deux pays et des zones frontalières où se trouvent les zones diamantifères) n’est pas des plus simples à raconter. Elle ne se raconte pas, elle se vit et se lit. Elle s’appuie sur une écriture particulière qui est le point fort de l’ouvrage, une écriture poétique de laquelle se dégage une très belle musicalité qui donne naissance à cette danse du vilain au mambo de la fête. On se surprend à relire à voix haute des passages du livre quelquefois.
Alors si vous ne connaissez pas la plume de cet auteur congolais, il est à mon avis temps de venir s’y confronter pour aller s’encanailler dans la joie et la bonne humeur. Je l’ai découvert grâce à ce livre et grâce aux éditions Métailié et j’en suis ravi. Je risque même de me lancer dans la lecture de son premier ouvrage très prochainement.
Jean-Louis Zuccolini
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