Le Musée d’Art Moderne de Paris présente une exposition sur l'oeuvre de la photographe Sarah Moon.
Intitulée "Sarah Moon - PasséPrésent" et organisée sous le commissariat de Fanny Schulmann, conservateur du patrimoine attachée au MAM, elle a été conçue par Sarah Moon, qui en assure la direction artistique, selon un parcours affranchi tant de la linéarité chronologique que de l'exhaustivité attachée à la rétrospective.
L'artiste, photographe et cinéaste, indique l'avoir pensé comme une installation façon "Bits and Pieces" (Bouts et morceaux) pour une mise en résonance articulée autour de sa filmographie, et plus précisément du thème du fabuleux de quatre de ses opus qui revisitent des contes populaires, et un livre inachevé qu'elle indique ne pas vouloir publier.
Ordonnée comme une déambulation mnésique avec des oeuvres dépourvues de cartel didactique, elle ne ressort pas à la monstration balisée mais à la mise en résonance ce qui implique pour le visiteur une démarche analytique pour tenter de l'appréhender même si sont tracés aux murs quelques pistes de réflexion par ailleurs toutefois s'avèrent paradoxales.
Telle la citation en quasi préambule, ("Je guette l'imprévisible, j'attends de reconnaître ce que j'ai oublié") et une démarche narrative apparemment contradictoire ("J'invente une histoire qui n'existe pas, je crée un lieu ou en efface un autre, je déplace la lumière, je déréalise et j'essaie". Les seules certitudes tiennent à ce qui semble être celle d'une approche proustienne du temps et à la pratique d'une photographie narrative.
Sarah Moon, la quête de la vérité de la fiction
Après la photographie de mode, et notamment la campagne publicitaire pour la marque Cacharel à la fin des années 60 avec laquelle elle gagne ses galons et accède à la reconnaissance qui l'inscrit dans l'histoire de la photographie de mode, Sarah Moon se consacre à des travaux personnels caractérisés par un tropisme évident pour la photographie moderniste et la photographie narrative.
Ainsi, pour la photographie pictorialiste par le traitement "impressionniste" de l'image avec les techniques de tirage argentique, autour du grain et du flou, pratiquées par son tireur Patrick Toussaint qui participe d'une esthétique reconnaissable, le cinéma expressionniste avec le monochrome noir/blanc qui exalte le clair-obscur et la photographie surréaliste avec des clichés qui évoquent les expérimentations de Brassai et de Kertész.
Et la réunion de clichés de différentes périodes appréhendés comme des arrêts sur image dont l'agencement évoque un plan-séquence met en évidence la fictionnalisation du réel et la narration visuelle qui président à l'oeuvre de Sarah Moon.
La seconde évidence révélée tient à l'iconographie avec le sujet féminin de prédilection et dans un double registre, celui classique du portrait et celui, plus atypique, de la silhouette avec une femme aux traits non identifiés et non identifiables en raison d'un cadrage tronqué, d'une prise de vue en plongée, comme pour la série sur le motif de la baigneuse, ou de dos, du port d'un chapeau à large bords ou de l'apposition des mains également présents pour les photos de mode comme pour celles de 1996 pour Issey Miyake dont certaines en couleur
A noter une salle des collections permanentes dédiée à son mari l'éditeur Robert Delpire décédé en 2017 qui a fondé le Centre National de la Photographie.
Et à voir en vidéo la rencontre avec Sarah Moon lors de la 10ème édition du Festival planche(s) contact de Deauville dont elle assurait la présidence |