Pour les fans de la première heure, chaque concert de Jack the ripper, toujours trop rare, revêt un caractère d'événement.
Après deux albums d'une rare qualité, leur 3ème opus Ladies first sorti en XXX révèle la grande maturité d'un groupe singulier qui a su réunir autour d'un frontman, chanteur-auteur, charismatique des musiciens de qualité, et dont les compositions prennent une belle ampleur.
Cet album abouti et riche dans lequel on retrouve le son et l'univers uniques du groupe reçoit un accueil plus que mérité.
Ambiance feutrée, le public est assis et attend les Jack The Ripper de pied ferme. Syd Matters, en formation réduite à un trio qui paraît minuscule sur le devant de la grande scène du Trianon, ouvre la soirée. 3 guitares, parfois un clavier, et 40 minutes parsemées de quelques belles mélodies de pop acoustique.
Car le coeur n'y est pas vraiment, ni du côté du public qui attend l'univers dense des Jack the ripper, même s'il ne faillit pas aux applaudissements de politesse, ni du côté de Syd Matters qui, un peu désenchanté, lâche un "Salut, on est la première partie" et "Bon là faut qu'on remercie les Jack the ripper de nous faire jouer ce soir".
Quelques minutes pour le changement de scène, et la grande scène du Trianon devient presque trop exigüe pour les 9 membres de Jack the ripper qui ont choisi d'interpréter "From my veins to the sea" en ouverture.
Le concert démarre timidement d'abord.
Puis les vrombissements de la batterie et de la basse nous emportent immédiatement dans l'univers paradoxalement sombre et joyeux de Jack the ripper.
Au chant, Arnaud, très pale, les yeux cernés de noir, maîtrise parfaitement sa voix atypique et les ovations ne se font pas attendre.
Au programme les nouveaux titres bien évidemment avec "From my veins to the sea", "Hungerstrike at the supermarket", le dissonant "Goin' down", "I was born a cancer" sur lesquels les duos de voix avec une jeune femme ou les chœurs assurés par le trompettiste ou le violoniste en renforcent l'effet.
Débordants d'énergie les musiciens ont gagné en assurance et confiance au fil des tournées.
Leur grande complicité rend leur jeu plus naturel, plus fluide et moins appliqué.
Le groupe nous gratifie également d'une reprise de Léonard Cohen ("Manhattan") et a invité Sébastien Schuller pour un duo étonnant et détonnant, tant pour la voix que le look, sur "Old stars" Les morceaux emblématiques de leurs précédents opus I'm coming ("Escape", "Martha" et son violon rageur, la ballade d "Her ghost") et The book of lies ("Prayer in a tango", "Dog meets wolf", "The assassin" toujours aussi furieux) constituent des incontournables qui donnent sur scène toute leur puissante et leur richesse.
Le public est comme fou quand le tambour est amené sur scène, ce tambour sur lequel Arnaud frappe comme un dément et qui est devenu un des must cathartiques du groupe "Party downtown".
Ces anciens titres graves et poétiques, se mêlent brillamment aux nouveaux, tout simplement beaux, dans une unité confondante démontrant si besoin était la forte cohérence de ce groupe tant artistique qu'humaine et leur capacité à maintenir un son unique
Doux, puissant, inspiré, émancipé de ses influences (Nick Cave en tête), Jack The Ripper est devenu une excellente référence qui a prouvé ce soir qu'il était un vrai groupe de scène en pleine évolution.
Le set s'achève sur un "Feral buddleia" apocalyptique. La salle est en liesse et n'en finit pas d'applaudir et de trépigner.
En rappel, le très beau et émouvant "Son of…" rarement joué en concert sur lequel Arnaud s'installe sur une chaise avec une guitare et "I used to be a charming prince" tout en montée progressive en puissance affectionnée par le groupe.
Insatiable, la salle demande un second rappel qui ne pourra être effectif, malgré la bonne volonté du groupe, sa playlist confirmant la programmation d'autres titres, en raison des contraintes horaires de fermeture des salles de spectacles parisiennes ainsi que l'explique Bruno fort contrit.
Qu'à cela ne tienne ! Il suffit de retourner les voir au cours de leur tournée "First lady tour" qui passera notamment par la Flèche d'Or le jour des amoureux. |