Réalisé par George A. Romero. Etats Unis. Horreur. 1h30 (Sortie 2 juin 2021 - 1ère sortie 1973). Avec Lincoln Maazel, Harry Albacker et Phyllis Casterwiler.
Voilà vraiment un film quasi inédit, une rareté comme les aiment les cinéphiles ! Et en plus, elle est l'oeuvre d'un cinéaste culte, George A. Romero, l'auteur de la célèbre "Nuit des morts vivants" et qui, le premier, a réveillé les zombies pour en peupler le cinéma fantastique américain à partir de la fin des années 1960 jusqu'à aujourd'hui...
On pourra donc s'étonner que "The Amusement Park" de George A.Romero soit resté au purgatoire depuis 1973. La raison en est simple : ce film d'une heure tout juste n'est pas une production cinématographique proprement dite.
Romero a répondu à une commande de la "Lutherian Services", une organisation issue de l'église luthérienne, qui voulait attirer l'attention sur la condition des personnes âgées stigmatisées ou maltraitées en raison de leur âge.
Sans doute connaissant mal le cinéma de Romero, ses producteurs improvisés ont-il été très surpris par le résultat et tentés de le mettre à l'index avant même qu'on le montre à la télévision où il était prévu qu'il serve une campagne contre la maltraitance des vieux.
On se demande d'ailleurs quel média "normal" aurait pu accepter ce qui constitue l'un des plus grands films d'"horreur" de Romero. Car, comme l'indique son titre, le film traite de l'existence comme s'il s'agissait d'un parc d'attraction dont le troisième âge n'est pas du tout la cible.
Au contraire, quand elle monte dans les manèges qui se succèdent, la personne âgée vit à chaque fois un cauchemar nouveau, subit des violences qui, peu à peu, vont la mener à la mort...
Dans ce film trépidant, on suit un beau vieillard élégant dans son costume blanc, un vieillard aux bonnes manières, jovial et prêt à passer du bon temps dans une fête foraine. Cet homme, sans doute veuf et fortuné, va vite déchanter et subir un "traitement de choc" qui va laminer à la fois son apparence et ses dernières illusions.
"The Amusement Park" de George A Romero est pire qu'un film d'horreur, c'est un cauchemar sans fin, celui de la vie qui s'achève pour tous de la même façon : inévitablement par la déchéance, la souffrance et l'oubli éternel...
On comprend très vite pourquoi une organisation religieuse qui voulait alerter sur le sort des vieux s'est sentie trahie en voyant ce monument d'angoisse métaphysique que lui a proposé Romero.
Que le film soit virtuose, ne perde pas une seconde pour enchaîner les supplices subis par son personnage central et vise juste, ne pouvait que le desservir auprès de gens qui rêvaient plutôt d'images mièvres et lénifiantes à la gloire des aînés.
En plus les affres du temps sur "The Amusement Park", parfaitement restauré mais datant d'une époque où les couleurs pouvaient virer, amplifient son étrangeté et donnent l'impression que Romero filme les vieux avec leurs yeux fatigués ne distinguant plus la lumière réelle mais une bouillie colorée parfois marronnâtre de laquelle émergent le rouge et le blanc.
Dans les conditions du moment, la résurrection de "The Amusement Park" de George A.Romero a des résonances inattendues. L'humour noir qui s'y est insinué est aussi efficace que terrifiant... |