Spectacle conçu et mis en scène par Mina Poe, avec Mina Poe, Rémy Charlet et Maxime Pichon.
Ça pourrait être un concert rock destroy, celui d'un trio qui ne s'entend dans lequel une chanteuse tyrannique et narcissique n'en fait qu'à sa tête et joue sa partition sans tenir compte de son bassiste ni de celui qui est aux claviers.
Ça pourrait être - et ça l'est sans doute un peu - un récital de poésie féministe où la diseuse - et parfois chanteuse - enchaîne et aligne les poétesses au destin quelquefois pas fameux, souvent tragiques ou sanglants.
C'est aussi un oratorio, celui d'une femme brisée qui s'adresse à quelqu'un qui serait dans le public, quelqu'un qui lui fait face et dont la présence l'empêche de dire correctement les vers magnétiques dont elle est dépositaire.
Au lieu de ça, tiraillée entre ses musiciens et dérangée par cette présence hostile, elle massacre ce qu'elle considérait comme l'expression de la beauté ultime.
Spectacle paradoxal et frustrant, "Massacre à la Poézie" est un exercice de style à nul autre pareil. On notera consciencieusement les références aux poétesses citées. Des plus célèbres (Marceline Desbordes-Valmore, les Brontë, Sylvia Plath) aux plus inconnues (Pernette du Guillet, Li Quinzao, Ewa Lipska), Mina Poe sait choisir celles qui peuplent ses émotions. Son goût est sûr et on aurait aimé les entendre in extenso plutôt que d'en avoir des extraits alléchants.
Dans son rôle de star maudite de l'"underground", elle a l'air parfaitement mal à l'aise, se délectant des sous-entendus de ses musiciens (Rémy Charlet et Maxime Pichon), totalement rôdés dans leur numéro de duettistes, as du dénigrement faussement excédés.
Ce spectacle OVNI ne devrait pas manquer de cliver les spectateurs entre ceux qui n'aimeront pas ce vrai faux ratage maniéré et ceux qui y verront un work in progress au fil du rasoir, caustique et, finalement, ayant compris l'essence du poétique. |