Le Musée Jacquemart-André propose une immersion dans la Renaissance italienne, et plus précisément la fin du Quattrocento et l'Ecole florentine, avec une rétrospective dédiée à son plus emblématique et illustre représentant Alessandro Filipeti dit Botticelli (1445-1510).
Une exposition au titre singulier "Botticelli - Artiste et designer" par l'emploi, qui ne semble pas approprié, d'un terme anglo-saxon "designer" dans son acception contemporaine.
Mais sans doute se réfère-t-il à son synonyme de stylicien au regard de la pratique d'atelier de Botticelli en tant qu'entrepreneur et diffuseur de son oeuvre.
Organisée sous le commissariat des conservateurs Ana Debenedetti et Pierre Curie, respectivement au Victoria and Albert Museum et au Musée Jacquemart-André, la monstration se déroule en un parcours chrono-thématique afin, indiquent-ils, d'une part d'illustrer l'évolution stylistique du peintre et, d'autre part, sa filiation et son influence avec la mise en contrepoint d'oeuvres de ses contemporains.
Botticelli, "le génie d'invention" comme le qualifie la co-commissaire, et le maître ancien le plus côté sur le marché de l'art après Leonard de Vinci, est régulièrement à l'affiche des institutions muséales du monde entier
L'exposition "Botticelli Reimagined" à Londres en 2016 au Victoria & Albert Museum était particulièrement intéressante par son thème de la postérité de Botticelli du Pré-raphaélisme à l'art contemporain
l'exposition in situ et en vidéo
La dernière en France, intitulée "Botticelli, de Laurent le Magnifique à Savoranole" a eu lieu en 2003 au Musée du Luxembourg avec 20 toiles.
Elle proposait une relecture de son oeuvre notamment au regard du contexte politique florentin de son temps sous obédience de l'influence et du mécénat de la famille patricienne des Médicis.
Botticelli dans le continuum artistique
Le Musée Jacquemart-André a réuni une quarantaine d'oeuvres que le visiteur pourra apprécier en fonction des tropismes botticellien dont, en premier lieu, sa fidélité à la tradition technique de la peinture à la détrempe sur panneau de bois en un temps où nait la peinture à l'huile sur toile.
Ensuite, la poursuite de la novation stylistique amorcée par ses maîtres, Filippo Lippi qui lui enseigne l'art de la peinture de chevalet et de la fresque et Andrea del Verrocchio, qui fut le professeur de Léonard de Vinci, et sa pratique des arrière-plans travaillés dans une peinture figurative et une construction n'intègrent pas les tendances émergentes du réalisme anatomique et de la construction-perspective.
Et ce, dans le registre de la grande peinture, avec, d'une part, la peinture d'histoire et les sujets religieux conventionnels tel celui de la Vierge en format classique de peinture de dévotion ("Vierge à l’Enfant dite Madone Campana", "Vierge à l’Enfant dite Madone au livre"), mais également en retable ("Le Couronnement de la Vierge avec les saints") et en tondo destiné à la sphère privée ("La Vierge du Magnificat", "Nativité devant une ville maritime").
Egalement les sujets mythologiques ("Venus pudica"), bibliques ("Le retour de Judith à Béthulie", "Le Jugement de Pâris", "Judith tenant la tête d’Holopherne") et littéraires (les dessins sur parchemin illustrant "La Divine Comédie" de Dante).
D'autre part, le portrait pour lequel il procède à la fusion des traditions italienne et flamand avec le portrait de profil de médaille à la manière non ostentatoire ("Julien de Médicis", "Savoranole") ou de figure féminine allégorique ("La Belle Simonetta" retenue pour l'affiche de l'exposition)
Boticelli utilise un répertoire de figures et de motifs récurrents
dont celle singulière, avatar de la Ninfa antique, signifiée pa la sculpture "La Vénus de Médicis", de la jeune fille évanescente aux longs cheveux et aux vêtements fluides, dont le visage aux traits éthérés qui est érigé en idéal de la beauté occidentale et concourt au culte de la beauté, notamment dans les célébrissimes "Le Printemps" et "La Naissance de Vénus", irriguant la pensée humaniste de la Renaissance.
En préambule à la visite : à voir l'exposition en vidéo et à écouter le podcast "Botticelli, génie créatif" dans l'émission "L'Art est la matière" de Jean de Loisy avec la commissaire de l'exposition Ana Debenedetti et Isabelle Schmitz, rédactrice en chef adjointe du Figaro Hors Série. |