Il est intéressant de noter que le football fait depuis quelques années l’objet d’un regain d’intérêt snobinard. La revue "So Foot" en est la preuve, version footbalistique des Inrockuptibles, avec photos léchées, articles soignés foisonnants de références lettrées.
On y parle des joueurs comme Vikash Dorahsso, de son intérêt pour les Pixies. Du coup, les bobos se disent que si Vikash écoute le groupe culte de leurs années lycée, c’est que c’est finalement un brave type…
Ils me font bien marrer les Parisiens avec cet art (manie ?) de passer au filtre intello n’importe quoi. Je dirais bien aux journalistes de "So Foot" d’aller faire un tour dans mon ancien club, la jeunesse sportive d’Andel, histoire de voir... J’ai franchement été fan de foot jusque 14 ans, mais bon après, mes centres d’intérêts se sont brusquement déplacés vers le rock à guitares bruyantes et vers les filles… Le foot dans les petits patelins provinciaux, c’est essentiellement pour ne pas perdre le lien social…
D’après mes souvenirs, le football était loin de traîner l’image cool et limite glamour dont il jouit aujourd’hui. A l’époque, c’était plutôt comme dans la chanson de Miossec : ça sentait la bière, l’animal et la mauvaise foi : les coupes Waddle et autres "mullet à la Jean Luc Ettori" tenaient le haut du pavé, les 205 GTI crachaient du "No No No No No No No No Limit" à fond la caisse avec la pouffiasse décolorée sur le siège passager, qui suivait par obligation et qui ignorait que sa légitimité se limitait à faire valoir…
Si un joueur adverse avait le malheur d’être un peu basané, on lui servait du "Vas-y bamboula !" et les calembours de café de commerce pleuvaient de toute part… Heureusement, à 16 ans, j’ai vu la lumière grâce à Sonic Youth, au surf, au skate et j’ai séché de plus en plus les entraînements de football… Récemment, le film "A 21st Century Portrait" a contribué à renforcer cette tendance d’intellectualisation du foot. Un film centré sur "notre Zizou national", dont l’aura et le talent ont séduit les cinéastes Douglas Gordon et Phillipe Parreno.
Pas un simple documentaire, un réel objet cinématographique esthétisant, se concentrant sur la grâce et la maestria du divin tonsuré. Mais oubliez l’affreuse bande son débile du coup de boule de Zidane qui vous a sûrement bien pourri votre été, car ici les auteurs de ce film ont fait appel à la fine fleur du post rock écossais : Mogwai.
Stuart Brainwithe et sa bande se sont gentiment pliés à cet exercice imposé. Sur cette bande originale, Les Écossais montrent leur facette "post" plutôt que "rock". Les dix morceaux lorgnant vers les moments les plus calmes de Cody, mais sans jamais atteindre cette délectable tension qui régnait sur le chef d’œuvre du gang de Glasgow.
Conséquemment, les morceaux sont un peu trop statiques et génèrent plus de frustration que de plaisir, l’auditeur attendant en vain les salvatrices déflagrations sonores. Reste ce "Black Spider 2", menaçant et interminable, plus proche des expérimentations d’un Christian Fennesz ou d’un Sonic Youth autiste que du math rock pêchu de Mogwai.
Le fan pointu du groupe y trouvera forcement son compte, maintenant je vois mal mes élèves, ados footeux de quinze ans, tous fans de Zidane "kiffer cett zique de ouf" comme ils la qualifieraient sûrement. |