Comédie dramatique de Guyla Halasz Brassai, mise en scène de Michel Bruzat avec Marie Thomas (Théâtre de la Passerelle)
Elle est là, couchée sur la neige, son landau à côté d'elle. Elle, c'est Mademoiselle Mallarmé. Dans quelques instants, elle va crier sa vie. Avec gouaille, avec révolte, avec drôlerie. Avec l'énergie de tous les desespoirs...
Que dire qui n'ai déjà été dit sur ce spectacle ? Non, le mot de "chef-d'oeuvre" n'est pas galvaudé en ce qui le concerne. Oui, "Histoire de Marie" est bien Le Chef-d'oeuvre de ce Festival 2007 !
Sur un texte de Brassaï, fortement inspiré de ses rencontres nocturnes parisiennes, "Histoire de Marie" brosse le portrait d'une femme simple et analphabète mais tellement chaleureuse qu'elle nous réapprend à vivre. Marie dans sa vie n'a jamais rien été, mais sur scène elle est tout. Elle a la noblesse du coeur.
Comment raconter sans le dénaturer ce petit bijou ? Il faut venir rencontrer Mademoiselle Mallarmé. C'est une de ces rencontres rares qu'on fait parfois dans sa vie. Et c'est un spectacle unique aussi. Et qui donne tellement à réfléchir...
"Histoire de Marie" n'est pas du théâtre, c'est la vie et même beaucoup plus... Michel Bruzat donne à voir celle qu'on ne regarde pas, il fait entendre celle qu'on n'écoute pas. Et avec quelle force. Et avec quelle humanité... Sans pathos, sans fioritures, "l'artisan" du Théâtre de la Passerelle a construit un spectacle exceptionnel. Sa mise en scène limpide, intelligente, précise crée des séquences de toute beauté où Marie semble quitter la scène pour nous rejoindre en rêve...
A l'heure où d'autres emploient des moyens sophistiqués, Michel Bruzat prouve que rien ne remplace un plateau nu, un texte, et un acteur pour le défendre. L'essence-même du théâtre. Grande leçon pour tous ceux, (et non des moindres) piégés par la surenchère technologique, qui s'enlisent dedans, qui montre que le talent ne s'achète pas et que seule la vérité touche.
Depuis Philippe Caubère à ses débuts, aucun "seul en scène" à Avignon n'avait eu cette puissance, cette simplicité même. Marie Thomas a ce quelque chose de naïf, d'enfantin qui nous la rend tellement proche au fin fond de notre âme. Comme l'enfant en nous qu'on a oublié.
Elle tient le public comme sous hypnose, captivé par une telle magie. Ruptures, changements de rythmes, de voix, de personnages : tout y est. Le corps est maîtrisé à la perfection. C'est une immense comédienne dans tout son art et dans toute sa générosité. Et les chansons qu'elle accompagne à l'accordéon sont des éclairs d'amour qui vous fissurent le coeur.
Marie Thomas, Michel Bruzat au nom de tous les spectateurs qui ont déjà rencontrés, Marie : Merci, infiniment Merci... Et mon plus profond respect. |