Comment faire parler de son dernier album tout en experimentant une nouvelle manière de vendre la musique ?
Radiohead, toujours en avance d'une bonne longueur, a testé une solution qui pourrait bien s'étendre si l'avenir nous montre qu'elle a fonctionné : commencer par mettre en ligne un site mystérieux puis un véritable lieu d'achat du disque en proposant deux versions : la première en coffret avec de vrais disques à l'intérieur et un souci du luxe pour une facture assez elevée (les fans sauteront sur le collector), le second, destiné aux amateurs de numérique qui ne se servent de leurs cds que pour les compresser en mp3, en version numérique au prix que l'internaute fixera lui-même.
Initiative unique mais ô combien maligne pour forcer le public à donner quelques livres au groupe pour télécharger l'album le jour de la sortie plutôt que de rechercher une version copiée de l'opus sur des réseaux parallèles. 3 livres, 10 livres, chacun décide du prix et nul doute que de nombreux curieux qui n'auraient pas donné 15 euros dans le disque ont tenté l'experience. L'album ne devait d'ailleurs pas ressortir en version 'normale' mais imaginons qu'une fois l'euphorie de ce procédé passée, il faudra bien remplir les bacs des disquaires.
Ce 10 octobre donc, un email a donné à tous les acheteurs le lien de téléchargement de ce nouveau disque, attendu depuis quelques années par les fans. Le pack à télécharger est mince, simple (un zip avec les fichiers) mais malheureusement, mauvaise surprise, la compression mp3 (160 kbps) n'est pas celle d'un album cd. L'internaute audiophile qui aura donc décidé de télécharger l'album n'aura plus qu'à acheter la version cd. Dommage de se lancer dans une aventure aussi originale sans aller jusqu'au bout et sans proposer une meilleure qualité audio à tous les amateurs.
Après l'étude de la méthode de vente, qui devrait faire date, et la forme du produit, décevante, reste le contenu. Et sur ce point, Radiohead deçoit également. Comme d'habitude, Radiohead fait du Radiohead, mêlant avec une rare maestria l'électronique à l'acoustique, la voix unique de Thom Yorke aux guitares à effets, mais à l'exception de certaines perles, l'ensemble laisse une impression d'inachevé, de disque bonus, en attendant un nouveau chef d'oeuvre.
Après l'ouverture de "15 Step" très électro, la sonique "Bodysnatchers" sera certainement le moment le plus remuant et le plus exaltant de ce très calme album. Suivront plusieurs balades dont les excellentes "Nude" ou "Faust Arp" où les cordes s'entremêlent pour tenir l'étonnant débit rapide du chanteur ou encore la très aérienne "House of Cards". Retour à l'action avec "Jigsaw Falling into place" pour retomber dans le calme avec le dixième titre du court album.
On pourrait dire le plus grand bien de cet album, principalement pour le fait qu'il soit peut être le début d'une révolution numérique. Malheureusement, même s'il se trouve dans la lignée des précédents, il ne fait pas le poids face aux Kid A ou Amnesiac beaucoup plus riches. Un simple coup marketing ? surement pas, mais une grande deception sans aucun doute.
|