Ancien étudiant d'histoire de l'art, Christian Lacroix rêvait d'être conservateur de musée, puis costumier. Il est devenu un grand couturier dont chaque collection est placée sous le signe du renouvellement magique.
Il a ouvert sa maison de couture en 1987, 20 ans donc cette année, un anniversaire qui a généré cette exposition dont il est le commissaire et qu'il a conçu, non comme un mausolée autosatisfactionnel, mais comme un musée imaginaire retraçant des "Histoires de mode".
Christian Lacroix retrace trois siècles d'histoire de la mode à travers la sélection subjective qu'il a opéré au sein du vaste fonds du Musée de la mode et du Textile qu'il met en résonance avec ses propres créations qui ont été choisies par Olivier Saillard, conservateur audit musée.
Les vêtements sont présentés sur portants et sur mannequins "profilés" par le couturier dans une scénographie très plastique de Jean-Michel Bertin, néons à la Dan Flavin pour la vitrine "Rayures", parterre d’œillets pour "Hispanisme" et sections de tuyaux PVC pour "Pois",
"Histoires de mode" revêt le caractère d'une vraie exposition d'art par sa démarche et invite le visiteur à un voyage à la recherche du temps présent.
Les réminiscences de mode : un festival de formes et une explosion de couleurs
Des guipure, organza, tussor, faille et crêpe georgette du début du 19ème siècle au polyester des années 70 en passant par les fantaisies surréalistes d’Elsa Schiaparelli, des broderies, plissés et paillettes aux rivets, l'exposition apparie les modèles dans un dialogue inattendu qui confirme que la mode est un éternel recommencement.
Comme pour les peintres, les toiles d'études, Christian Lacroix argumente de visu avec des modèles qui du blanc au noir explorent toute la gamme chromatique.
Couleurs pures, mélange hardi de couleurs ou de textures, déclinaisons pétulantes en fleurs, pois et lignes ravissent l'oeil.
Quant aux formes, si certaines paraissent relever de l'Histoire du costume, la vitrine "Historicisme" atteste de leur pérennité par la voie de la déclinaison ou du détail pour tous les couturiers.
Présentant la tendance de sa collection Haute Couture automne/hiver 2007-2008, Christian Lacroix indique :
"Simplement exprimer, avec la main à la fois plus légère mais aussi plus lyrique, tout ce qui m'est cher, tout ce qui m'inspire, tout ce qui fait que j'aime la couture depuis la peinture flamande jusqu'aux années sur lequelles j'ai ouvert les yeux en passant bien spur par les périodes les plus opulentes de l'histoire de la mode comme le 18ème siècle, la Belle Epoque ou l'entre-deux guerres."
Les 30 stations du chemin de Lacroix
Par les choix opérés, ainsi que les cartels
qui accompagnent les 30 vitrines de ce parcours chrono-thématique et dont il a écrit le texte,
Christian Lacroix révèle, d'une certaine manière, quelques clés de son inspiration à travers 30 thématiques et notamment l'une qu'il nomme "Art du singulier, mon mauvais goût de toujours"
Une inspiration qui est aussi de l'ordre de l'intime : les tuniques blanches de sa grand-mère, les jupons fleuris de sa mère, les gitanes d'Arles, sa ville natale, d'une belle et savante simplicité mais aussi les infantes intemporelles et les princesses mythiques.
Il pratique comme personne le mélange des textures et des couleurs dans une luxuriance baroque qui convient à de subtiles cérémonies secrètes.
"Personnellement, j'oscillerai toujours, tout en maintenant le cap d'un fil d'Ariane mystérieux, entre la pureté des structures et l'ivresse des ornements." précise-t-il.
Subjective, érudite et foncièrement sensible, cette exposition clôturerait-elle un cycle pour Christian Lacroix aujourd'hui à la maturité de son art ?