Texte de Marguerite Duras, mise en scène de Sylvia Bruyant, avec Brice Notin et Sylvia Bruyant.
Assise à côté de la table dans le parloir de la prison où elle est emprisonnée, les mains serrées sur les genoux, un verre d'eau à proximité, Claire Lannes se tient là. Silhouette recroquevillée, voix rauque, elle va dans cette pièce dont la porte derrière elle paraît démesurément grande, répondre aux questions de l'homme qui l'interroge.
Partant d'un fait divers qui eût lieu dans les années 50 : le meurtre au marteau par une femme de sa cousine sourde-muette, Marguerite Duras décrit dans "L'amante anglaise" le face à face entre la criminelle et l'interrogateur pour une tentative d'explication de ce crime horrible. Des enregistrements en voix off de différents personnages proches de la coupable éclairent une petite partie de l'énigme ou la brouillent encore plus...
Sylvia Bruyant est une remarquable comédienne. On le savait depuis "Oléanna" de David Mamet, où elle était sensationnelle en étudiante timide qui relevait peu à peu la tête pour devenir le bourreau de son professeur au fur et à mesure de leur échange.
Elle nous offre ici une autre facette de son talent dans un rôle encore plus éloigné d'elle : un travail de composition impeccable et rigoureux - chaque mouvement du corps, d'un hochement de tête à un geste de main semblant marqué par la vie pénible de cette femme trop ordinaire. Elle est Claire Lannes, ça ne fait aucun doute.
A ses côtés, Brice Notin, comme effacé, joue le questionneur méticuleux qui peu à peu perd patience face à l'accusée qui le balade avec délectation et toute l'immensité de son imaginaire. Tout ça seulement pour qu'il l'écoute ; laissant percevoir une vie de profonde souffrance, gardant dans le coeur et dans la tête à travers les années l'image intacte de l'agent de Cahors.
Un spectacle au mystère opaque et la prestation convaincante d'une comédienne fascinante. |