Conte
écrit et interprété par Michèle
Nguyen, dans une mise en scène de Alberto Garcia Sanchez.
Sur les traces d’un Vietnam qu’elle n’a pas
connu (le pays de son père), Michèle Nguyen, Belge
née en Algérie, part à Hanoï, écouter
(et enregistrer) les bruits de la ville, interroger les gens
pour peu à peu retrouver ses racines et réinvestir
le champ de ses origines, entre tradition et modernité.
C’est bien à un voyage que nous convie la conteuse
belge : un voyage singulier, rythmé par les sons enregistré
par un ami. Un voyage dans lequel on est entraîné,
dès les premières minutes, par la magie d’une
raconteuse hors-pair qui tourne, avec lenteur et la plus grande
délicatesse, les pages d’un périple qu’on
fait avec elle, entrecoupant son journal de voyage de conte,
berceuse et danse traditionnels. Avec une discrétion,
une minutie et toujours le geste juste, elle nous invite au
rêve dans un récit pourtant imprégné
de la réalité ; c’est bien là son
immense talent.
A mi-mots, chuchotant jusque dans l’oreille de chaque
spectateur pour lui faire partager ses secrets, elle nous berce
de la douceur de sa voix qui s’apaise peu à peu
des choses qu’elle voit ou respire. L’émotion
est présente du début à la fin mais l’humour
aussi est là, quand elle joue les personnages (même
un buffle) ou son incompréhension face à ce monde
qu’elle découvre et qui lui parait incongru, avant
qu’elle ne le comprenne tout à fait et trouve son
harmonie en retrouvant son rythme propre, à l’image
de cette sublime chorégraphie, enseignée par une
danseuse traditionnelle.
Dans cet assemblage de scènes, cousues de fil d’or,
Michèle Nguyen avec une simplicité rare, nous
fait voir les paysages, sentir le temps qu’il fait ou
les odeurs d’une fleur de lotus. Avec une émotion
qui nous étreint et nous coupe le souffle.
Elle voulait "nous faire entendre une musique", elle
a réussi : "A quelques pas d'elle" est une
pièce sonore dont sa voix est l’instrument principal.
Mais il y a aussi...le bruissement du tissu quand elle danse,
les sons de là-bas (les innombrables klaxons, les cris
des gens ou le sifflement d’un mainate) et puis le silence…
Ce spectacle a la pureté du diamant brut : parfait dans
ses irrégularités et resplendissant de toute son
évidence. Un petit bijou d’amour véritable
par une exceptionnelle conteuse à l’univers infini.
Magnifique.
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