Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi le succès de Gorillaz vous horripilait, et pourquoi la pop anglaise (on s'accorde tous à dire que Gorillaz rentre dans la case pop, non ?) vous touchait une oreille sans ébranler l'autre ? Si oui, moi aussi.
Et le seul constat saisissant en cette fin d'année 2008, c'est que j'aurais bien aimé moi, bon français, posséder un groupe d'ici qui puisse atteindre ce niveau, lorgner vers le succès sans restreindre la mélodie à sa plus simple portée.
La nouvelle venue (encore que... le groupe s'est vu fermer moult portes avant l'entrée chez MVS) d'Apple Jelly change radicalement la donne. Vous pourrez aimer, cracher, renacler, pire encore, passer à côté, rien n'effacera le fait que les frères Jelly publient ici un premier album héroïque, mettant de côté le sempiternel "premier album accidentel sur lequel trône un faux tube régnant sur neuf autres titres médiocres".
Pour brouiller un peu les cartes, chaque titre porte des noms alambiqués, et l'album est un bras d'honneur au premier degré. Un délire enfantin qui n'hésite pas à enjamber le terrain miné ("hip hop-electro-pop") pour délivrer au moins six tubes potentiels sur son premier effort, dont "The Punk" (les branchés détesteront, et alors ?) qui réduit à l'état de confiture les tentatives mollassonnes qu'on s'inflige tous sur Myspace tous les jours.
Second fait marquant, le groupe n'est pas parisien. Une lueur d'espoir pour tous les groupes de province que le salut se situe encore entre Noir Désir et Moby ("Bonjour Maubeuge, on est les Dirty stars from Sisteron, voilà notre tube"). Nanana Club est un album dépolitisé où le message est musical, la parole y est un subterfuge, une excuse, aux meilleures mélodies ("Don't you know who I think I am") qui plongent ouvertement dans la FM classe.
A l'heure où s'écrivent ces lignes, une brassée de groupes tentent l'expérimentation pour justifier les cachets d'intermittence misérables, le tout afin de conserver l'indépendance qui les a fait connaitre auprès de 15 personnes un soir de décembre. Apple Jelly prend le revers de cette tradition typiquement française. Quelques fois un peu pompier ("After life of the party", prétexte à un refrain gimmick, ou Fame in Famy, disposant du pire solo d'harmonica jamais entendu), les deux frères gardent malgré tout le cap sur la pop, basse en avant sur tous les titres.
Preuve définitive qu'aimer Macca et Serge G. reste possible, sur un territoire monochrome set. Nanana Club possède la fraîcheur des premiers albums qui n'ont pas à dire leur nom pour séduire un public acquis d'avance à leur cause. |