"Electric Arc" ouvre ainsi l'album, pour que tout soit clair : le moteur d'une moto qu'on met en route, qu'on fait ronfer un peu avant de s'élancer sur une route, poignée dans le coin ; basse-batterie sautillantes ; puis la guitare et la voix ; "i can't remember things" ; à deux cent kilomètres heures ; who cares ?

Punk-rock distingué et foisonnant à la mode de nos années 00, la musique d'Oxford Collapse souffrira peut-être de l'ombre d'autres dandys indie-rockers plus célèbres, à commencer par sa très médiatique altesse Franz Ferdinand. Jusqu'au chant de Michael Pace, qui se rapproche de temps en temps de celui d'Alex Kapranos – peut-être pas sans malice, d'ailleurs, tant il joue parfois à s'étrangler et se vocaliser l'instant suivant.

Pourtant le trio de Brooklyn n'en est plus à jouer les figurants ou les courtisans. Quatrième album de sa carrière, Bits serait même plutôt l'album d'une certaine maîtrise – on n'osera pas dire "maturité" tant il y a de vie, d'énergie et de folie là-dedans.

Pour produire ces 13 titres pour pas tout à fait 39 minutes, Oxford Collapse s'est offert le luxe de la composition d'une bonne trentaine de morceaux en un temps resserré, sans trop réfléchir ni explorer, en ne donnant parfois de mots à leurs notes qu'aux derniers instants avant l'enregistrement. De là à conclure que Bits n'est pas l'album le plus affiné de toute l'histoire des guitares saturées, il n'y a qu'un pas. Et pourtant. Le duo de cordes de "A Wedding" réussira encore à surpendre et rappellera peut-être, dans l'esprit sinon dans la lettre, les gueuleries avinées d'un Shane Mc Gowan, éventuellement acoquiné de son Nick Cave le plus frivole.

Reste que c'est bien l'énergie du trio, ses débordements, ses volte et ses faces incessantes qui prime ici, l'avidité, celle qu'il y a à jouer vite et fort, entre amis, en toute complicité, à se poser, soudainement, sur un contre-temps inattendu, à surprendre l'auditeur, le plaisir de gueuler ensemble son refrain, d'emmêler les voix pour que d'autres puissent sauter sur place. Un album enthousiaste et généreux, léger comme sait l'être le bon rock. Une belle urgence à écouter – de toute urgence.