En 2008, après l'exposition consacrée au demi-siècle de création de Valentino qui tirait sa révérence, le Musée des Arts Décoratifs célèbre le 40ème anniversaire le Maison Sonia Rykiel qui, loin de mettre la clé sous la porte, inaugurait en janvier sa plus grande boutique au monde dans son sein des seins sis boulevard Saint Germain.

Olivier Saillard, directeur de la programmation du Musée de la Mode et du Textile, assure le commissariat de cette exposition qui, sous le titre "Sonia Rykiel Exhibition", qui ne se constitue pas uniquement une rétrospective.

En effet, elle se présente également comme une invitation à découvrir l'univers intime de la créatrice et de la femme dont le processus créatif se révèle éminemment personnel.

Ainsi dit-elle : "Je fais mes collections sur moi, en me regardant dans une glace, et je serais tout à fait incapable de créer un modèle que je n’aurais pas envie de porter.

Ce qui est judicieusement souligné par la scénographie, signée Jean-Christophe Poggioli et Pierre Beucler, qui insère les vitrines muséales dans un contexte environnemental haussmanien propice à esquisser le portrait de la dame en noir à la crinière de feu qui inventa la démode.

"Il n'y a pas d'étapes dans ma mode, juste des moments"

L'exposition commence avec un lourd rideau noir qui lève le voile et s'achève sur la femme Rykiel vue à travers des modèles uniques créées par des couturiers éminents. Entre les deux se développe un extraordinaire parcours chrono-thématique sur deux niveaux.

Le premier, plus coloré, recense les premières collections qui dégagent les fondamentaux à partir desquels Sonia Rykiel va élaborer un vocabulaire stylistique unique qu'elle déclinera ensuite au gré de d'idées novatrices.

Ces fondamentaux puisent dans les lignes fluides, qui convient les figures légendaires de Louise brooks et Greta Garbo, les colifichets à la Coco Chanel et le style garçonne des années 30, s'imposent pour élaborer un style rive gauche chic et glamour.

Sonia Rykiel n'hésite pas braver le paradoxe entre la décontraction des matières souples et moelleuses et l'utilisation de strass et dentelles.

La démode consiste à explorer des voix nouvelles telles que la maille issue au rang de matière noble (le fameux "poor boy sweater"), l'interpénétration des registres avec le jogging devenu vêtement de ville, la suppression des ourlets, l'extériorisation des coutures illustrant au pied de la lettre d'un précepte de haute couture sur la qualité des finitions et qui veut que l'envers soit aussi beau, les vêtements combinables et les superpositions.

Sous un éclairage tamisé qui incite à la découverte initiatique, le second niveau illustre l'univers dans lequel s'inscrit le style Rykiel.

Un univers qui privilégie la couleur noire et qui a trouvé une méditrice en lapersonne de la photographe Dominique Isserman à qui, dès 1979 et pendant plus de dix ans, sont confiées les campagnes publicitaires.

Avec des photographies en noir et blanc esthétiquement très travaillées qui jouent sur les réminiscences mnésiques, cette dernière transcrit parfaitement le style Rykiel.

Celui d'une mode intemporelle destinée à des femmes totalement modernes et qui intègre cependant des références connotées et crée une véritable image de la marque.

A l'appui des vêtements, vidéos de défilés ou d’interviewes, photos, documents personnels de travail mais aussi de correspondance sont mis en scène pour éclairer tant la personnalité de la créatrice que sa démarche délibérément artistique.