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Interview  (Paris)  23 mars 2009

Quatre ans après Live it out, Metric revient avec un nouvel album, Fantasies, dans les bacs le 14 avril. Emily Haines et Jimmy Shaw, à l'origine du groupe, reviennent sur la conception avant leur première étape française à la Maroquinerie, le 4 mai prochain. Rencontre.

D'où vient le titre de l'album Fantasies et que signifie-t-il pour vous ?

Jimmy : Il parle de fantasmes, de rêves. Il fait référence au futur, au monde dans lequel nous voudrions vivre.

Il vient de vous ?

Jimmy : Oui. Enfin on l'a emprunté à la langue anglaise... (sourire)

Emily, vous avez dit que cet album était pour vous un moyen de faire un, de vous retrouver. Que vouliez-vous dire ?

Emily Haines : Depuis le dernier album, on a tourné dans beaucoup, beaucoup de pays, une dizaine. J'ai fait mes propres albums solo, je suis tombée amoureuse, j'ai rompu, j'ai vécu dans trois villes différentes. Ca a été une période très fragmentée pour moi et je voulais vraiment que cet album réunisse tous ces projets, ces idées, ces sons différents. Je voulais qu'on focalise de nouveau sur Metric, qui est le fondement de ma vie musicale.

Comment vous y êtes-vous prise pour l'écriture ?

Emily : J'ai tout envoyé chier et je suis partie en Argentine. J'y suis restée deux mois, seule avec un piano. J'ai rencontré des gens incroyables, des artistes, des photographes, des musiciens. La ville elle-même est une incroyable source d'inspiration. Je suis ensuite revenue vers mon groupe, enfin capable d'assumer le niveau d'écriture. J'étais désormais présente et prête à le faire. Cela a coïncidé avec le moment où Jimmy a eu son studio. A partir de là, ça a été très rapide et Fantasies a été un vrai plaisir.

Vous avez enregistré une partie de l'album dans les bois. Comment ça s'est passé ?

Jimmy : On a effectivement commencé l'écriture dans un studio près de Seattle, dans une forêt. C'était étonnant. Mais on a surtout enregistré la plus grande partie dans mon studio à Toronto et s'il y avait une forêt, on ne l'a pas vue parce qu'il y avait énormément de neige. C'était un hiver très difficile donc si vous étiez à l'intérieur, vous étiez heureux, donc on l'était ! C'était un bon processus, on a pris notre temps, on a pas mal expérimenté, on a pris du temps pour laisser la musique nous dire où aller plutôt que de se presser et prendre rapidement des décisions dont on n'aurait pas été très sûr.

Comment définiriez-vous l'identité de l'album ?

Emily : Je dirais qu'il traite du fait de regarder devant soi. On voulait vraiment éliminer toutes les choses du passé. C'était moins une façon de capturer ce qu'on avait été et plus de nous laisser une chance de créer quelque chose de nouveau, créer un nouveau son que probablement personne n'avait entendu avant, plutôt que quelque chose à laquelle les gens s'attendaient. Chaque album de Metric est vraiment différent du précédent. Et le prochain sera très différent aussi.

Jimmy : D'ailleurs, je pense faire un album de heavy metal après. (Rires) Ce serait marrant. Parler du démon.

Emily : Tu pourras écrire les paroles sur celui-ci (rires).

Jimmy : Ok, avec plaisir !

Quel est le morceau le plus représentatif de l'album selon vous ?

Emily : Pour moi, c'est "Help I'm alive", le premier.

Jimmy : Pour moi aussi.

Emily : Parce que lyriquement, c'est l'un de ceux où les émotions, les sentiments, sont complètement honnêtes. Il parle de la peur du futur, de doute.

Jimmy : Il y a quelque chose qu'on a essayé de suivre, c'est l'idée que la première chanson de l'album est celle qui capture l'identité de l'album, c'est la même chose sur tous les albums, pareil avec "IOU" sur Old World Underground et "Empty" sur Live it out.

Quelles ont été vos influences ? Est-ce que le monde, l'actualité vous inspirent ?

Emily : Pour la première fois, ce n'est pas un album lourdement affecté par les politiques du monde parce que je me suis isolée de cette réalité et parce qu'on est enfin arrivé au bout de ce que j'appelle les années sombres, ces huit ans où on a été sous l'ombre, où il ne s'est passé, selon moi, que des dégâts. Donc c'est vraiment excitant d'être maintenant au début d'une nouvelle ère. Quant à mon inspiration, elle vient plus des lieux que j'ai visités, des films que j'ai vus, des différents artistes qui m'ont intéressés que de quelconques groupes. On était plus intéressé par l'idée de capturer des images, des sons, que d'imiter qui que ce soit.

Quels sont ces films qui vous ont marquée ?

Emily : J'ai été très perturbée par le dernier film de David Lynch, Inland Empire, et par le premier film de Stanley Kubrick, The Killing, qui est pour moi l'équivalent, en film, de la parfaite chanson pop.

Jimmy : Je ne sais pas d'où vient l'influence pour être honnête. Emily écrit une chanson, j'ai une idée pour un son, on va en studio, on teste l'idée sur un instrument, puis un autre, puis quelque chose sort des hauts-parleurs et on se dit : "c'est ça !". Alors on continue. C'est juste un feeling, ça ne vient pas d'un groupe.

Emily : C'est le résultat d'une osmose.

Emily, pourquoi avez-vous un jour, en plein concert, décidé d'arrêter de jouer vos chansons "tristes" ?

Emily : On m'a demandé de faire un concert à Toronto et je me suis retrouvée à ne plus vouloir jouer ces chansons. Je ne pouvais plus, j'avais l'impression de mentir. J'ai essayé de les jouer mais je ne le sentais pas. Je me suis dit, si je ne peux plus habiter ces chansons, je ne veux plus les jouer. C'était fini pour moi. C'était une très bonne chose. Dans le public, ma famille, ma mère, les gens se sont mis à sourire, à crier, à s'embrasser : "ça y est, c'est fini, elle est heureuse, elle est revenue". C'était une période difficile, les gens m'ont suivie dans cette voie sombre et étaient contents de voir que je rayonnais de nouveau.

Comme la fin d'une thérapie ?

Emily : Je suppose. Ou juste l'art. En tant qu'artiste, il y a parfois des choses qui s'imposent, c'est d'ailleurs la seule chose qui m'ait toujours motivée.

Comment c'était d'assurer la première partie des Rolling Stones ?

Jimmy : C'était génial, excitant. Le spectacle lui-même, au Madison Square Garden, était super. Mais toute l'expérience, depuis le moment où on l'a appris était étonnante.

Emily : On était ici, sur une péniche, sur la Seine.

Quels sont votre pire et votre meilleur souvenir ?

Jimmy : Un de mes pires souvenirs est un chauffeur de bus qu'on a eu en Europe. Il s'appelait Tone, un homme tellement avare...

Emily : Il nous réveillait à 3h du matin et menaçait de nous laisser sur le bord de la route si on ne le payait pas dans la seconde pour le reste de la tournée.

Et le meilleur ?

Emily : Oh, il y en a tellement !

Jimmy : Le moment où on a su pour les Stones était un sérieux temps fort.

Emily : C'était la fin de cette tournée justement. On finissait un difficile tour de France. C'était très long, difficile, les spectacles étaient super mais on étaient vraiment fatigué. C'était notre dernière nuit à Paris et on se sentait un peu vaincu.

Jimmy : On est allé au mauvais resto, on s'est perdu, on avait faim, on était fatigué, on avait rendez-vous mais on ne voulait même pas sortir, on voulait juste aller se coucher.

Emily : Et j'essayais de guider tout le monde parce que j'étais la seule à parler français. J'en avais marre et tout à coup on se retrouve dans ce super endroit, à observer un cygne par la fenêtre.

Jimmy : Et juste à ce moment-là, je reçois le message sur mon BlackBerry. Oh my God ! C'est vraiment mon meilleur souvenir.

Vous aimez la vidéo. Avez-vous des projets ?

Jimmy : C'est nécessaire quand on est musicien d'avoir une image physique, une présence. On a commencé à apprendre comment faire des vidéos, on a travaillé avec des réalisateurs. C'est intéressant. On a fait des vidéos et on est très fier. Maintenant on travaille avec des gens et on peut faire des choses intéressantes. C'est un média difficile car beaucoup de vidéos sont faites pour promouvoir des groupes donc c'est difficile de faire quelque chose dans un but purement artistique. On doit faire quelque chose qui sert notre projet.

Qu'avez-vous de prévu après la tournée ?

Jimmy : On commence dans quelques semaines.

Emily : Notre vie est planifiée jusqu'à fin 2010. Le monde est grand. On est obligé d'y aller.

Jimmy : Et on veut y aller !

Emily : Oui, on a envie d'y aller, c'est vrai.

Comment vous voyez-vous dans 10 ans ?

Jimmy : Très beau, magnifique et vraiment élégant. Au Mexique, avec un très joli chapeau. Talentueux et svelte.

Emily : Je crois quand dans 10 ans, je serai toujours incapable de répondre à la question où je serai dans 10 ans (rires).

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En savoir plus :
Le site officiel de Metric
Le Myspace de Metric

Crédits photos : David Didier (Toute la série sur Taste of Indie)


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