La Liverpool française, la ville du pneu ou autre ville noire... Autant de surnoms pour Clermont Ferrand, capitale de l’Auvergne. Depuis quelques années, la scène locale grandit et se diversifie, en grande partie grâce à l’ascension de la Coopérative de Mai qui a permis à nombre de ces groupes de se produire sur sa scène. Comme partout il y a du bon comme du mauvais. Mais dans ce cas précis, c’est de l’excellent…
Pastry Case
Wheelchair And Jogging Suit
En voyant hip-hop sur la description du style de Pastry Case, il faut comprendre boite à rythmes et gimmick, mêlée à des mélodies pop. Ce qui nous donne un style hip-hop pop. Ah ! En effet, si un seul mot devait caractériser Pastry Case, ce serait bricolage, mais savant bricolage. Les chansons structurées à coup de sampler et de nappes de synthétiseurs sont entêtantes à souhait, comme "Upstairs" ou la sublime "Watergun or watergun". Le côté hiphop oldschool ressort plus sur d’autres titres comme "Hey hey", "My new jogging suit". Plus que jamais, on se rend compte que la beauté d’un disque n’est pas liée à la production ou à l’enregistrement à proprement dit, mais à la sincérité de l’artiste. A voir en live, où Pastry Case se transforme en véritable petite fanfare bric à brac, mélodica enfantin et boite à musique inclus.
St-Augustine
Changing Plans
Déjà repéré à la sortie de son premier effort In a field of question marks qui lui avait valu d’être sélectionné pour les découvertes du Printemps de Bourges, François-Régis Croisier alias St Augustine sort ici son vrai album. Et quel album ! Non sans rappeler Elliot Smith, les compositions sont mélancoliques, accompagnées d’un violoncelle lancinant et de guitares légères. Les autres membres de Kütu Folk Records ne sont jamais bien loin pour apporter leur petite touche à une musique et un songwriting déjà bien abouti, comme sur les titres "Rainy Country", "WWIII" ou encore "A nice picture of you". Le nouvellement réorchestré "Icelandic", agrémenté de trompettes, est sans doute le meilleur morceau de l’album. Tout est là, textes et voix magnifiques, arrangements simples mais sublimes. Une distribution nationale permettra ainsi au clermontois de faire découvrir tout son talent.
Leopold Skin
Leopold Skin And The Blue House Dandelions
Peut-être le plus vintage de tous les poulains de l’écurie Kütu Folk Records, alors qu’il en est l’un des plus jeunes, Leopold Skin livre ici aussi (et presque comme tous les autres) son premier opus. A l’écoute de cet album, il est clair que le jeune homme aurait aimé naitre il y a 30 ou 40 ans (d’où sa chanson "I dreamed I saw Bob Dylan" peut-être…). Très sobre du point de vue des arrangements, Leopold Skin joue sur sa guitare et son harmonica, armé d’une magnifique voix, déjà très particulière et un peu usée. Il nous balade à travers son univers pop folk légèrement mélancolique comme dans les titres "Flowers & Trees", "The voice of reason" ou "The colour of the past". Telle une grande tribu, on reconnait la voix de St Augustine dans les chœurs de "Walk & Talk", par ailleurs très Johnny Cash, ainsi que divers instruments présents dans le collectif Kütu. Leopold Skin & The Blue House Dandelions est un album magnifique, preuve que le talent n’atteint pas le nombre des années.
The Delano Orchestra
Will Anyone Else Leave Me ?
The Delano Orchestra n’en est pas à son premier coup d’essai. Après la sortie du très remarqué A Little Girl, a Little Boy, and all the Snails They Have Drawn, petit bijou post-rock, ils reviennent avec Will anyone else leave me ? enregistré dans leurs terres clermontoises. Au lineup classique d’un groupe s’ajoutent violoncelle et trompette, combinaison qui peut sembler étrange. Mais le tout est maitrisé, tout en douceur. La voix est toujours dans la retenue, comme pour ne pas masquer la beauté des instruments (dans le sublime "On the shore"). On ne peut s’empêcher de se laisser happer par toute leur palette d’atmosphères, que ce soit les plus percutantes comme "Endless Night" ou "Until I die", le calme avant la tempête pour "The escape" ou la légèreté trompeuse avec "Everything is done", sans doute un des meilleurs titres de l’album. Peut-être difficile d’accès au premier abord, cet album s’ouvre et se découvre au gré des écoutes. Mais découvrir de nouveaux détails à chaque lecture, n’est-ce pas le signe d’un grand album ?
Loin de nous cette idée de comparer ces disques, mais malgré toutes leurs différences, ils sont intrinsèquement liés par leur créativité, leur débrouillardise et leur talent. Ce qui rend l’entreprise Kütu encore plus belle. |