Spectacle
chorégraphié et interprété par Eléonore
Didier.
Il s'agit ici de deux pièces courtes solo. Dans chacune,
Eléonore Didier interroge le temps et l'espace avec son
corps, mais aussi son intensité et sa présence.
La complexion diaphane de la jeune femme souligne les efforts,
fait que son corps marque sous les mouvements, alors que ses
traits restent impassibles, et son regard infiniment concentré.
Dans "Solides, Lisboa", solo d'une quarantaine de
minutes, la chorégraphie s'articule autour de plan fixes,
de périodes d'immobilisme. L'arrivée, dans des
vêtements à la coupe droite et d'une matière
raide, permet par le léger tremblement d'une manche,
d'un pan de jupe de souligner l'effort demandé pour atteindre
ces périodes d'arrêt du temps. Le silence qui entoure
cette chorégraphie rend le spectacle hypnotique. Le public
est concentré et muet devant cette performance simple,
directe, évidente.
Dans un second temps, le corps se dénude. Sous les efforts,
le corps sue, se marque de rouge lorsqu' Elénore Didier
prend appui sur une table, ou sur une chaise. Le visage reste
concentré, les yeux bleus fixes et froids, mais le visage
rougit sous cet effort pourtant invisible. C'est la grande force
de ce spectacle, montrer l'effort à arrêter le
temps pour un instant. Lorsque, au milieu de la pièce,
un performer, Vincent Thomasset, rentre sur scène, s'assoit
à la table tournant le dos au public, parfaitement immobile,
un vide se creuse entre ces deux présences, la présence
du corps d'Elénore Didier, la densité qui s'en
dégage, n'en est alors que mise encore davantage en éclairage.
L'émotion provient de ces non-dits de la chorégraphie,
le tremblement du vêtement, la marque sur le corps, la
goutte de sueur, la poitrine qui malgré la maîtrise
parfaite du corps se soulève imperceptiblement.
Dans la seconde pièce "laiSSeRVenIR", Eléonore
Didier travaille tout d'abord sur des axes horizontaux alors
que l'espace est occupé par un escabeau. Le geste est
distancié même si évidemment sexuel. Puis
l'utilisation de l'espace sous l'escabeau en posture verticale
coupe peu à peu la danseuse de son environnement, dégageant
une zone de solitude, prison imaginaire, frustration sexuelle,
mais aussi lieu de création.
On peut même estimer que le spectacle ne s'est achevé
que lors des applaudissements finaux lorsqu'Eléonore
Didier a quitté son masque de concentration, que ses
yeux se sont éblouis et que le sourire est venu illuminer
son visage, car alors son corps entrait dans un dernier état,
la femme réapparaissant derrière la danseuse. |