Drame
de Jean-Paul Sartre, mise en scène de Guy-Pierre Couleau,
avec Gauthier Baillot, Xavier Chevereau, Michel Fouquet, François
Kergourlay, Flore Lefebvre des Noëttes, Anne Le Guernec,
Nils Öhlund et Olivier Peigné.
En 1943, alors que les armées d'Union Soviétique
marchent vers les pays d'Europe centrale, encore sous le joug
allemand, un jeune militant communiste Hugo, va commettre le
meurtre d'un des dirigeant du Parti, Hoëderer. Celui-ci
a choisi d'engager le parti communiste vers une stratégie
d'alliance avec les conservateurs et les monarchistes afin de
prendre le pouvoir, d'autres membres ne comprennent pas cette
stratégie, ou bien n'y adhèrent pas, ils souhaitent
voir Hoëderer disparaître.
La pièce de Jean-Paul Sartre aborde les thèmes
de l'engagement politique, de ce qui peut pousser un homme à
tuer ou à accepter de mourir, de la fin et des moyens.
La mise en scène de Guy-Pierre Couleau est très
sobre. Elle laisse le jeu des acteurs s'installer dans un rythme
qui laisse la part belle au texte. Cette fiction philosophique,
menée comme un roman noir, est servie par des acteurs
au charisme certain. Gauthier Baillot habite le rôle d'
Hoëderer avec une belle densité. Mais la surprise
vient surtout de Nils Öhlund dans le rôle d'Hugo,
le jeune militant communiste chargé de l'assassinat.
Dans une première partie de la pièce, hésitant
comme l'exige son rôle, il apparaît plutôt
effacé. Or au fur et à mesure que la pièce
se déroule, il s'affirme corporellement. Malgré
les hésitations d'Hugo, Nils Öhlund donne plus de
puissance à son jeu, et maintient l'attention des spectateurs.
Les autres acteurs réalisent aussi de belles performances.
Anne Le Guernec amène tout son charme à la composition
d'une Jessica, la femme d'Hugo, convaincante. Olga et Louis,
les communistes "purs", sont interprétés
avec finesse par Flore Lefebvre des Noëttes et force par
Michel Fouquet. Quant aux gardes du corps, dans des rôles
plus monolithiques, Stéphane Russel et François
Kergourlay jouent de leur physique et de leur voix.
La scénographie et les lumières sont discrètes,
la pièce est néanmoins imprégnée
d'une ambiance grise, terne, un peu triste, ce qui a pour résultat
de mettre en valeur aussi bien les acteurs que le texte.
Le texte de Jean-Paul Sartre, à notre époque
de "guerre contre le terrorisme", continue de résonner
de manière moderne. De plus, avant les élections
européennes qui voit les listes d'un Parti Communiste,
ancienne force d'une gauche plurielle, englobées dans
un Front de Gauche, tandis que le NPA, qui se réclame
comme une force de contestation mais non de gouvernement, fait
liste à part, le texte de Jean-Paul Sartre prouve la
finesse de l'analyse politique de son auteur sur le rapport
des hommes dans un engagement politique à gauche. |