"Il faut absolument réserver car le nombre de places est limité ; le Sous-Sol n'est pas un bar : on boit ce que vous apportez, (vin, cidre, bière, jus de fruits), à partager convivialement ; ce n'est pas une salle de spectacle, mais un atelier de création ; la participation est libre en fin de concert".
Voilà donc reproduit succinctement le mode d'emploi du Sous-Sol, salle atypique située, comme son nom l'indique au -1 d'un immeuble, près de Ménilmontant. A l'intérieur, la réalité ne diffère aucunement de la description ou de la vision que l'on s'en faisait : des tables, des chaises, un comptoir sur lequel sont posées les bouteilles amenées par chacun et au fond, une scène, avec piano, batterie, guitares et basse.
Après la fermetures des portes, c'est une grosse cinquantaine d'invités qui a pris place dans une ambiance bon enfant mêlée à une certaine curiosité. Une fois n'est pas coutume (comme souvent malheureusement), la taille de la salle est inversement proportionnelle à la qualité de l'artiste devant se produire.
L'affiche de ce soir semble irréelle : Alex Chilton, mythique fondateur des Box Tops ("The Letter" écrite à dix-sept ans), de Big Star (avec Chris Bell au début des années 70), producteur du premier Cramps au début de la décennie suivante...
Voir dans ces conditions un musicien d'une telle trempe est une chance rare, inespérée surtout ... et les gens présents le savent ...
Comme tout le portait à croire, c'est affublé de sa traditionnelle Epiphone en bandoulière, qu'il pénètre sur la petite scène. Malgré une entame sur deux titres de feu Big Star, notre homme ne fera plus jamais référence au répertoire faisant sa légende, lui préférant d'obscures reprises, dont certaines fortement influencée par ses origines de Menphis, ou des titres de ses albums solos passés et à venir.
Les outrages du temps sont inexistants, Alex Chilton demeure toujours Alex Chilton, avec sa classe innée, sa voix certes un peu endommagée mais avec un jeu de guitare intact, l'excellence du bassiste et du batteur l'accompagnant faisant le reste.
En 2004 plus que jamais, Alex Chilton incarne l'archétype du beautiful loser, cet ange dont leur l'oeuvre restera à jamais inscrite dans l'histoire du rock, ignoré, oublié même du public rock, plongé pour l'éternité dans un anonymat culte.
Même s'il est toujours possible de déplorer son refus de jouer un rappel - "September Gurls" est réclamée dans le public -, il n'en reste pas moins que ce set de soixante-dix minutes fut parfait, à la hauteur de l'attente envers une telle légende.