Voilà un album pour les longues soirées d’hiver. Certes, pas de ces soirées où l’on scrute l’horizon, en observant la pluie froide frapper le carreau embué, seul, en attendant des jours meilleurs… mais plutôt de ces soirées à deux, dans une vieille maison en pierres, à regarder la neige tomber en écoutant les bûches crépiter dans la cheminée, un verre à la main.
La musique de Laura Gibson est très minimaliste, difficile à décrire : folk dépouillé, élégance, sobriété, jeu de guitare plus qu’épuré ("Sweet Deception" ôtera tout complexe aux amateurs dont je fais partie, ayant mis de côté leur guitare sèche, lassé de ne pas en tirer plus de deux accords).
Dès lors, chaque note revêt une importance particulière, chaque instrument (piano, violon, guitare, percussions…) est mis en valeur, à commencer par sa propre voix qu’elle prend plaisir à triturer et à repousser dans ses moindres retranchements.
L’album, enregistré dans des conditions proches du live, est construit en deux parties distinctes : tout d’abord les "Communions Songs", suivies très vite par les "Funeral Songs". On peut y voir une méditation sur la vie et la mort ; à croire que nous sommes tous obsédés par cette idée de laisser la bande originale de nos funérailles avant qu’il ne soit trop tard… Le mouvement déjà amorcé magnifiquement par les Band of Horses ou Arcade Fire prend ici une nouvelle dimension.
Dès l’introduction, le long "Shadows on Parade" pose l’atmosphère et les bases de l’album : chaleur, intimité, voix envoûtante. On ne peut pas dire que la fête battra son plein mais le voyage est immédiat : on quitte la ville et ses tracas pour se projeter dans les grands espaces plus reposants de son Oregon natal.
Surprise sur "Spirited", le titre le plus enjoué et rythmé de l’album : une (fausse) joie envahit les c(h)oeurs et on se prendrait presque à secouer la tête et tapoter du bout des doigts. Rayon de soleil de courte durée ; les nuages reviennent bien vite obscurcir ce ciel tourmenté.
Après quatre titres, changement d’ambiance : le mélancolique "Funeral Song" nous bascule dans cet état de tristesse qu’on adore invoquer ponctuellement. A la manière d’un Tom Mc Rae des bons soirs ou d’une Kristin Hersh période Hips and Makers.
Le ton se fait plus froid, le vent souffle, le brouillard se lève, le rythme, si c’était possible, se ralentit encore ("Sleeper"). Juste le temps d’invoquer une dernière fois les valeurs familiales sur "Glory", avant de tirer sa révérence.
L’album s’écoute d’une traite et pour une fois dans l’ordre, c’est bien là qu’on l’apprécie le plus. "If these bare walls could sing, They would sing us a funeral song". |