Texte de Samuel Beckett dit par Alain Macé avec la complicité de Hervé Pierre.

Au premier degré, "Premier amour" de Samuel Beckett se présente comme les soliloques narrativo-délirants d'un homme au comportement psychotique. Asocial, amoral, sans domicile fixe, vagabond vivant en marge de la société, éructant sur l'humanité, ce monde de prépuces cireux et d'ovules désappointés, qui aime les odeurs des cimetières et dont l'intérêt majeur porte sur ses défécations, ses douleurs et ses moments d'absence au monde.

Au second degré, ce texte est considéré comme "la légende fondatrice de celui qui devint écrivain", l'homme "condamné, pour le restant de ses jours à fouiller les détritus de sa vie, à les vomir et revomir sans cesse".

Sur la scène vide à l'exception d'une chaise, Alain Macé, vêtements tirebouchonnés et terreux, nus pieds dans ses chaussures, regard halluciné en vrille, toujours aux aguets, se glisse dans la peau étriquée et l'âme douloureuse du narrateur qui, après la mort de son père protecteur, entre désarroi et confusion, erre de banc en asile, du cimetière à une étable abandonnée pour transiter par la chambre mise à sa disposition par une prostituée strabique qui sera son premier amour.

Sans effet scénique, avec simplement une coloration naturaliste et une figure de clochard céleste qui rappelle certains personnages de Beckett, il livre le verbe beckettien, entre rire pathétique et solitude abyssale de l'homme face au néant.

Ce qui n'est pas rien.