La Fondation Pierre Bergé-Yves Saint-Laurent présente une exposition consacrée à "Jean-Michel Frank - Un décorateur dans le Paris des années 30" qui fut le décorateur attitré du gotha parisien des années folles, de Marie-Laure de Noailles à Elsa Schiaparelli en passant par Cole Porter et François Mauriac.
Les intérieurs décorés par Jean-Michel Frank s'inscrivent dans le style Art déco qui, sous l'égide de la Sécession viennois prônait, en réaction aux ondoyantes courbes organiques et à la débauche d'arabesques ornementales des années Art Nouveau qui finit en style Nouille, le retour à la ligne droite et aux formes géométriques.
Toutefois, sa prédilection pour les matériaux raffinés et l'artisanat du luxe donna naissance à un style très personnel et singulier qui fut qualifié, de manière apparemment antinomique, de "luxe pauvre" qui est illustré dans l'exposition par plusieurs salons reconstitués dans leur intégralité.
Le luxe pauvre de Jean-Michel Frank
Ce style, qui selon Pierre-Emmanuel Martin-Vivier, qui assure le commissariat de l'exposition scénographiée par Jacques Grange, auteur d'une monographie qui replace l'œuvre du créateur dans le contexte artistique, intellectuel et politique de son époque, reflète "l’étrange luxe du rien", consiste en un minimalisme absolu, tant en ce qui concerne la forme et la couleur que le volume et le nombre des meubles meublants, enchassé dans un environnement résolument neutre.
Evacuant
tout superflu et toute ornementation, le meuble, aussi élégant
et fonctionnel soit-il, ne doit jamais distraire ni le corps
ni l'esprit pas davantage que la tapisserie ne saurait accrocher
l'oeil.
Seuls des sculptures-luminaires d'Alberto Giacometti ou de Salavador Dali, une toile de Picasso et, exceptionnellement, un élément de décor coloré tel un paravent du décorateur Christian Bérard, trouvaient grâce à ses yeux.
Affectionnant tout particulièrement les couleurs minérales et plus précisément la gamme de bruns déclinée de la terre de Sienne à l'ivoire, ses ensembles intemporels inspirés du néoclassicisme français revisité à la lumière du cubisme et du primitivisme mêlent harmonieusement au cuir gainé, au métal patiné et au chêne sablé ou ciré, l'ivoire, le galuchat, les feuilles de pierre plaquées et la marqueterie de paille.
Pour découvrir un artiste dont la notoriété demeure confidentielle alors même que ses créations définitivement intemporelles constituent en France la référence invoquée et assumée de nombreux designers et architectes d'intérieur de renommée internationale telle Andrée Putman.