Comédie dramatique de Allain Mollot d'après le roman de Graham Greene, mise en scène de Alain Mollot, avec Joan Bellviure, Yola Buszko, Jean-Philippe Buzaud, Frédéric Chevaux et Emmanuel Depoix.
"Lorsqu'une femme occupe vos pensées toute la journée, on ne devrait pas, par surcroît, rêver d'elle la nuit.", "Je croyais faire la chronique d'une haine, mais la haine s'est effacée." Telles sont les pensées qui hantent Bendrix, le personnage interprété par l'impeccable Emmanuel Depoix.
"La fin d'une liaison", d'après le roman de Graham Greene, est l'histoire de la jalousie d'un homme envers son ancienne maîtresse, qui l'a quitté sans un mot d'explication. Il n'est pas jaloux du mari, mais des possibilités qui s'offrent à cette femme. L'incompréhension le rend fou au point d'engager un détective privé deux années après leur dernière rencontre, soit-disant pour aider le mari à découvrir si elle a une liaison.
La mise en scène est sobre ; quatre chaises, un fauteuil, un bureau, 4 paravents. Les paravents sont mobiles, modifiant la disposition de la scène. Sur ces paravents noirs, des projections, noires et blanches, qui par un jeu d'ombres chinoises créent de nouveaux lieux de décor : Une chambre, un jardin, un salon... La mise en images de Pierre Lescot permet une scénographie à la fois simple et pleine de symbolique entre la part d'ombre et de lumière de l'histoire et de ses protagonistes.
Cette pièce, par la mise en scène d'Alain Mollot, est d'une fluidité absolue. Le narrateur revient aux débuts de la liaison, puis cherche à reconstruire ce qui s'est déroulé les années précédentes afin de trouver une explication à la fin de cette histoire passionnée qui l'obsède. C'est avant tout la preuve qu'une bonne pièce se construit d'abord autour d'un bon texte, de bons acteurs et d'une mise en scène au rythme de l'histoire. Aucun besoin de poudre aux yeux.
Les acteurs ont de vraies gueules de théâtre. Outre Emmanuel Depoix, déjà cité, les deux autres acteurs principaux, Yola Buszko, dans le rôle de Sarah, la femme adultère, et Frédéric Chevaux, dans celui du mari qui fait subir à son épouse la tyrannie du faible, sont eux aussi parfaits.
L'histoire est universelle, une histoire d'amour, de passion, de séparation, de couple qui s'ennuie... Selon qu'on s'identifie à tel ou tel personnage, chacun y trouve une part de vécu. Le décalage des personnages dans les étapes du deuil de cette fin de liaison, les mêmes que les cinq étapes du deuil - le choc, la colère, le marchandage, la dépression et l'acceptation -, provoque des situations dans lesquelles certains personnages, proches du pathétique, prêtent même à rire.
Enfin, on retrouve vers la fin de la pièce, certaines des obsessions de Graham Greene sur la religion catholique, ses doutes quant à sa foi, comme la marque de la patte de l'auteur du drolatique "Notre agent à la Havane" ou de l'intrigant "Agent Secret".
Cette pièce va prochainement tourner dans plusieurs salles de la banlieue parisienne, il serait dommage de ne pas se laisser porter par ce moment de théâtre simple, fin et puissant.