Comédie
conçue et mise en scène par Julien Sibre à
partir de textes de David Thomas, avec Marc Bottiau, Raphael
Cohen, Stéphanie Hédin et Sandra Valentin.
Deux jeunes hommes, deux jeunes femmes, crient leurs rêves,
leurs envies, leurs espoirs. A vingt ans tout est possible et
dix ou vingt ans plus tard certains en sont encore là.
Mais il y a la vie et le fil du temps qui se déroule
inexorablement.
Vient un jour le temps de poser ses valises et de se demander
pourquoi la vie n'est pas un conte de fées et que échec,
désillusion, rupture et séparation ont jalonné
une vie affective pourtant courte encore. Alors il pleut dans
le cœur et en attendant que cela passe, il faut faire le
dos rond et avoir la patience des buffles sous la pluie.
Julien Sibre a pioché dans le recueil de nouvelles,
intitulé justement "La patience des buffles sous
la pluie" de David Thomas, scénariste, auteur dramatique
et écrivain pour composer un kaléidoscope bigarré
de situations le plus souvent tendues sinon conflictuelles au
sein de couples qui se font et se défont avec une pluralité
de ton qui vont de l'humour à la causticité, de
la tendresse à la trivialité, de l'émotion
à la rancœur.
Cela donne une jolie comédie douce-amère qui
traduit bien l'air du temps et les moeurs contemporaines des
30-40 ans qui apprennent à leur dépens deux des
postulats incontournables de la vie amoureuse : d'une part,
comme le chante les Rita Mitsouko, que les histoires d'amour
finissent mal en général, parce qu'il y a l'usure
du temps et l'envie d'aller voir ailleurs si l'herbe est plus
verte, et, d'autre part, comme l'enseigne le thérapeute
conjugal John Gray, que les hommes viennent de Mars et les femmes
de Vénus. En d'autres termes, les hommes et les femmes
ne peuvent pas se passer les uns des autres et pourtant ils
ne sont manifestement pas faits par vivre ensemble.
La mise en scène de Julien Sibre est particulièrement
habile et réussie pour présenter ces scènes
de scènes, sans réelle linéarité
narrative, entre adultes consentants sous influences conjuguées
de leur individualisme patent et de la théorie de l'épanouissement
personnel dispensée par la psychologie humaniste qui
aboutit à n'accepter aucune concession et à la
tolérance zéro vis-à-vis de l'autre.
La distribution est particulièrement judicieuse et le
quatuor de comédiens, dont trois connaissent bien la
plume de David Thomas dont ils avaient joué la pièce
"Tais-toi et parle moi" dans ce même lieu en
2007, fonctionne bien. Tour à tour désopilants,
bravaches, attendrissants, horripilants, burlesques, désespérés,
ils donnent corps et cœur à des personnages à
facettes tout droit sortis de la vie ordinaire avec une véracité
ébouriffante.
Sandra Valentin est désarmante
et remarquable dans le rôle de la jeune femme insignifiante,
rôle particulièrement difficile, et Stéphanie
Hédin jubilatoire dans celui de la vraie fausse
femme libérée croqueuse d'hommes. Côté
masculin, Marc Bottiau s'avère
irrésistible en lymphatique désabusé et
Raphael Cohen parfait dans le rôle
de l'idéaliste dépité.
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