Nous aimons avoir peur. La preuve, les films dits catastrophe font toujours de très bons scores au box office, les mauvaises nouvelles aux infos font grimper les taux d’audience. C’est donc une bonne idée marketing que de sous-titrer son livre L’effet sablier par La fin des classes moyennes, tant la plus grande partie de la population se sent appartenir à cette catégorie.
Encore faut-il que l’argumentaire tienne les promesses annoncées et offre soit le suspens lié à cette fin avec scoops, rebondissements et autres péripéties, soit une histoire documentée et commentée de cette classe de ses origines à cette fin annoncée.
Malheureusement, ce n’est ni l’un ni l’autre que nous trouvons dans ce petit ouvrage pourtant prometteur car bien chapitré, mais brouillon et répétitif.
Pourtant, dès les premières pages, Jean-Marc Vittori tente une définition de la classe moyenne. Oui tente, car voici les critères de reconnaissance de la classe moyenne : "leur position entre des couches populaire et l’élite, [….] un imaginaire commun de progrès et d’émancipation, [un] sentiment d’appartenance à une même société dans laquelle on peut progresser".
Voilà la seule définition de la classe moyenne dans tout l’opuscule, et il faut avouer qu’elle est bien généraliste. Une fois cette tentative de définition faite, l’auteur reprend les poncifs actuellement en vogue sur l’école qui ne propose plus l’ascenseur social ou encore l’accès par le plus grand nombre aux biens de consommation dits "pour riches" et le surendettement qui en découle. Il digresse également pendant de longues pages sur le décloisonnement des gammes de prix, avec une méconnaissance flagrante des habitudes de consommation de ses compatriotes et en faisant un amalgame facile entre la disparition des produits de gamme moyenne et la disparition prochaine de la catégorie socio professionnelle correspondante à savoir la classe moyenne.
Certes, le fait que l’essor de l’informatique et des nouvelles technologies en France a fait disparaître, et continue de faire disparaître, des professions. Mais quid du reclassement de ces personnels remplacés par des ordinateurs ? Est-ce parce que les secrétaires n’existent pratiquement plus que ces derniers sont devenus des SDF et sont sortis de la classe moyenne ? Les raccourcis de ce type sont légions dans l’ouvrage, et mise à part l’image explicite du sablier, où la classe moyenne occupe la partie resserrée dudit sablier qui nous permet tout de suite de comprendre où l’auteur veut en venir – sous l’effet de la gravité, la classe moyenne va s’écouler lentement dans la partie basse et donc se paupériser, l’accès à la partie haute, dite élite, étant quasiment impossible de nos jours compte tenu de la sclérose de la société –- cet ouvrage n’apporte ni explications – ou peu convaincantes – ni solutions à cette fin qu’il annonce pourtant proche. Comme quoi, un bon titre ne présage pas toujours un bon livre. |