Monologue
dramatique de Antonio Tarantino interprété par
Anne Mercier dans une mise en scène de Eric-Gaston Lorvoire.
Sur la scène, une table couverte de bondieuseries bon
marché. Au mur, un portrait du Christ encadré
de fleurs en plastique.
Marie sort de l'ombre. Elle racontera d'un ton gouailleur,
dans une langue crue et imagée, le calvaire que fut sa
vie. Elle narrera ses jeunes années, les épreuves
dues à la misère, comment son voisin l'a mise
sur le trottoir, pourquoi elle n'a pas avorté lorsqu'elle
est tombée enceinte, les ennuis de son fils Jésus
avec la justice lorsque celui-ci rejoint un groupe politique
armé, et finalement sa mort en prison. Marie incarne
autant la Mater Dolorosa que la Mater Furiosa.
Le texte d'Antonio Tarantino joue sur les répétitions,
la crudité des mots jusqu'à l'écœurement
pour décrire la misère, l'indigence et la misère
intellectuelle, de ce quart-monde italien composés d'affreux,
sales et méchants. Ce flot incessant de mots se transformera
alors en une crue de révolte.
La scénographie intensifie le sentiment de dénuement
en insistant sur le kitsch des guirlandes lumineuses qui éclairent
les objets de culte à deux sous et des balades italiennes
sirupeuses, dégoulinantes de déclarations d'amour
frelatées, diffusées entre les scènes.
Anne Mercier, nommée aux Molières en 2009 pour
son interprétation de Dorine dans le "Tartuffe"
de Molière monté à l'Odéon par Stéphane
Braunschweig, campe avec une présence impressionnante
ce personnage truculent et profondément blessé.
Sa stature et sa voix, comme épuisée par les abus
de mauvais vin et de tabac, convaincront le plus récalcitrant
des spectateurs.
Le réalisme violent cependant empreint de mysticisme
de ce spectacle peut surprendre et entraîner une certaine
réserve vis-à-vis du texte. Antonio Tarantino
n'a certes pas cherché à écrire une pièce
aimable, mais la composition sans concession d'Anne Mercier
transcende son matériau de base pour le transformer en
une œuvre forte et impressionnante. |