Comédie
darmatique de Jean-Baptiste Platel, Catherine Lecor et William
Herremy, mise en scène de Willima Herremy, avec Marie
Daguerre, Hervé Mahieux et Stéphane Jourdier.
Jean-Baptiste Platel était le fondateur du syndicat des ouvriers boutonniers de l'Oise. Il joua un grand rôle dans la grève de Méru en 1909, grève de 99 jours durant laquelle les ouvriers se révoltèrent autant pour améliorer autant leurs conditions de travail que pour maintenir leurs salaires.
Au 19ème siècle, les boutonniers travaillent la nacre. Mais au début du 20ème, un nouveau coquillage est introduit, le troca. Bien moins cher à l'achat, les fortunes des familles qui détiennent les usines s'envolent alors que les conditions de travail des ouvriers se détériorent et que les patrons veulent en plus baisser les salaires.
Ce spectacle est d'abord intéressant par les faits historiques qu'il rappelle. Dans la France insulaire et rentière des années 20, un jeune disciple de Keynes, nommé Pierre Mendès-France, qui souhaitait combattre l'injustice sociale et l'abaissement démocratique qui découlait de ces situations, annonçait : "L'heure est venue de substituer aux dogmes du laisser-faire, laisser-passer, le statut économique de l'avenir, celui de l'État fort contre l'argent fort". Ces paroles résonnent fortement au vu de l'actualité récente.
"99 jours, les troubles" a le mérite de rappeler les conditions de travail d'hier, ce que les luttes syndicales ont pu amener de mieux-être, et aussi qu'elles ont pu permettre le développement de l'économie en facilitant la consommation de masse par l'amélioration des conditions salariales.
Et néanmoins, ce spectacle reste un objet théâtral à voir en tant que tel par-delà le sujet qu'il aborde. Il y a d'abord un fabuleux trio d'acteurs au jeu puissant. Marie Daguerre capte la lumière et se révèle une belle actrice d'instinct, Hervé Mahieux joue de manière massive et physique son personnage de syndicaliste révolté, et Stéphane Jourdier interprète plusieurs rôles, mais sans avoir à forcer le trait.
Il y a ensuite la mise en scène de William
Herremy qui sait utiliser le peu d'espace de la scène
pour faire monter les tensions. Enfin, les lumières de Guillaume
Giraudo accompagnent subtilement les états d'âme des
protagonistes à divers moments-clé de l'histoire, lorsque le
combat s'enlise ou lors des victoires.
Toutes les conditions sont donc réunies pour aller voir cette pièce, d'autant qu'on en sort riche d'un peu plus d'espoir en ces temps où le citoyen est de plus en plus souvent réduit à sa condition de consommateur et à une variable d'ajustement économique. |