Tragi-comédie écrite et mise en scène par Andréa Brusque, avec Clément Bernot, Antoine Berry Roger et Andréa Brusque.
Dans ce lieu pittoresque qu'est l'Hôtel Gouthière dans le dixième arrondissement parisien, vaste cour et salles intérieures, l'ensemble possédant un cachet incontestable, le Festival Nuits d'été argentines présente une création d'Andréa Brusque : "Cordoba". On y suit une jeune femme moderne dans une série de tableaux alternés ayant pour cadre le bureau, l'univers télévisé ainsi qu'une famille décomposée. .
L'avant-spectacle est rythmé par le bruit des éventails distribués à l'entrée (canicule oblige) mais ce bruit nerveux et saccadé cessera vite dès le début, tant la pièce, simple en apparence, recèle de chausse-trappes. Les premières scènes nous laissent penser qu'on va assister à une fantaisie décalée, mais très vite la comédie absurde et légère devient aigre, les répliques de plus en plus acérées et l'on vire progressivement au drame.
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On saluera tout d'abord la qualité de la mise en scène d'Andréa Brusque qui utilise au mieux l'espace (la mezzanine notamment) pour ne pas perdre le rythme dans les changements de lieux, aussi brusques (logique) que fréquents. On applaudira une chorégraphie littéralement "renversante", beau moment suspendu de cette farce amère.
Les acteurs sont tous trois très justes. Clément Bernot est absolument réjouissant en patron à la fois adipeux et empoté. Antoine Berry Roger qui formait déjà un beau couple avec la comédienne dans "Le Songe d'une nuit d'été " mis en scène ici-même l'an dernier dans la cour de l'hôtel avec beaucoup de réussite par Stephan Druet, montre une animalité et une présence magnétique. Quant à Andréa Brusque, an tant qu'auteure et metteuse en scène, elle se fait plaisir avec des scènes qui nous confirment qu'elle est une actrice de tempérament (et de talent!)
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Cette pièce, très moderne dans l'aspect, est riche d'une foule de thèmes tout en s'ancrant dans la réalité sociale de l'Argentine contemporaine. Elle nous en présente des échantillons : une famille détruite pas le disparition de la mère ; l'absurdité de la bureaucratie (teintée de Kafka) et des références aux tortures de la junte militaire ; un monde de paillettes présenté par la télévision - seule échappatoire d'une jeunesse perdue et une jeune femme désemparée qui trouve dans l'espoir d'une transformation chirurgicale (calquée sur les canons de beauté inventés par la mode) le seul moyen d'effacer son passé et de reconstruire sa vie. |