Il y avait longtemps qu'on n'avait plus entendu parler de Dave Formula. Il y a même beaucoup de monde pour qui le nom de Dave Formula est totalement inconnu. Et pourtant...
Pourtant, dans les années 60, ce monsieur faisait partie d'un groupe qui s'appelait St-Louis Union qui a remporté un concours organisé par le NME, la bible des journaux musicaux anglais, devant les Pink Floyd... Pourtant, il a partagé un appartement avec Martin Hannett, le producteur responsable et heureusement coupable du son des albums de Joy Division. Pourtant, c'était le clavier du groupe Visage, qui réunissait entre autres membres Midge Ure et Billy Curry d'Ultravox, John McGeoch de Siouxsie and The Banshees, Barry Adamson de Nick Cave and the Bad Seeds période The First Born Is Dead, et dont la chanson "Fade to Grey" (avec son couplet en français "Un homme dans une gare, isolé / Une valise à ses côtés...") a côtoyé le sommet de tous les charts européens en 1981. Pourtant, et surtout, il fut le clavier des mythiques Magazine, groupe fondateur de l'after punk, dont les albums Real Life et Secondhand Daylight ne peuvent être absents d'une discothèque digne de ce nom.
Alors, il est vrai que Dave Formula, c'est avant tout un nom qu'on retrouvait en lisant attentivement les pochettes de disques vinyl dans les années 80.
Mais c'est encore lui qui, lorsqu'il a commencé à enregistrer son album Satellite Sweetheart, a permis la reformation de Magazine en 2008. En effet, tous les membres de Magazine apparaissent en guest sur son disque. On y trouve aussi l'ami Robert Wyatt, avec qui il partage sa passion du jazz le plus exigeant, le trombone jazz Dennis Rollins, Corrine Drury, la voix des Swing Out Sisters, ou encore David McAlmont (remember le génialement soul et extraverti Yes de McAlmont & Butler en 1995).
A l'évocation de tous ces noms, vous aurez compris que l'univers musical de Dave Formula en 2010 n'est plus tout à fait le même que dans les années 70/80. Satellite Sweetheart est un mélange un peu hors du temps de jazz, de blues, de funk, de musique latine, de rocksteady et de sons dub. Cet album est construit autour de ses souvenirs d'enfance, dans le quartier de Moss Side à Manchester, quartier populaire où vivaient en harmonie diverses communautés, en particulier les jamaïcains qui lui ont ouvert le goût aux rythmes jazz, blues et reggae. Dave Formula avait, jeune garçon, assisté à une parade dont les héros était les cosmonautes Youri Gagarine et Valentina Terechkova, c'est là la trame de son disque.
Cet album, écrit et enregistré en plusieurs sessions, sur plusieurs années semble quelque peu manquer d'un fil conducteur. On y trouve la magnifique balade "Via sacra" soutenue par la voix d'Howard Devoto, "Anti-Hero" nimbé d'une ambiance vaporeuse digne de Japan, par la grâce de la guitare de feu John McGeogh, ou encore "Kiss To The Star" aux rythmes brésiliens.
Un album solide, professionnel, mais dont on pourrait regretter le manque de cohérence, chaque invité imprimant une empreinte forte. Malgré quelques bas, c'est un album qu'il convient d'appréhender comme une compilation, pour n'en garder que les sommets. On n'écoutera peut-être pas Satellite Sweetheart d'une traite, mais après quelques passages sur la platine on sait que certains morceaux y reviendront régulièrement. Dave Formula, un nom extrait du fin fond de notre mémoire, mais dont on comprend aujourd'hui qu'il n'ait jamais été effacé. |