Par une nuit froide à Kiev, un illustre pharmacien se fait assassiner. Cet évènement met en branle toute une série d’évènements qui impliquera différents personnages, tous aussi attachants que farfelus : la veuve éplorée qui veut faire empailler son défunt mari, un député carriériste qui carbure à un lait très particulier, un contrôleur de bagages qui tombe sur une valise pleine de fioles contenant un remède "anti-frousse" concocté par les soins de feu le susdit pharmacien… entre autres.
Le dernier Kourkov est un petit bijou d’humour décalé et doux-amer. Comme l’est la situation actuelle en Ukraine. Il s’en est passé du temps depuis son premier opus, Le Pingouin où l’on retrouvait un journaliste nécrologique obligé par la mafia locale d’écrire à l’avance ses articles afin de se synchroniser avec leur programme… chargé. Il sera aussi contraint de venir aux enterrements des morts chroniqués accompagné de son pingouin Micha, racheté au zoo de Kiev lors de sa faillite, parce que ça fait bien : l’animal est toujours en smoking !
Vous aurez compris qu’on a affaire à un écrivain dont l’imagination est féconde. Et il tire tout cela de son pays, l’Ukraine. Dans Laitier de nuit, les personnages évoluent dans une société post révolution orangiste, où la peur de la milice subsiste toujours, où les politiques ne semblent pas très honnêtes et où l’on fait de l’alcool à base de tout et de rien. Triste tableau me direz-vous. Et bien non, et c’est là tout le talent de Kourkov : derrière ce contexte général, il y a des gens avec leurs histoires, l’auteur sait les rendre croustillantes grâce à une vraie tendresse envers ses compatriotes qu’il sait observer, et un véritable sens de la narration chorale. A travers son écriture fluide et calibrée, il vous prendra par la main pour vous balader dans les sombres rues de Kiev et de ses villages alentours. Il vous montrera les planques où se trouvent les bouteilles de gnôle à l’ortie, et en guise de faune locale, vous apprendrez à suivre les mésaventures de chats zombies… Franchement mieux qu’un Lonely Planet !