Comédie dramatique de Timothy Daly, mise en scène de Isabelle Starkier, avec Daniel Jean et Pierre-Yves Le Louarn.
Deux acteurs, enfermés ensemble, sont condamnés à rejouer, encore et encore, la pièce de Shakespeare "Richard III" pour des spectateurs invisibles. Ces spectateurs, mais aussi geôliers, communiquent avec leurs prisonniers par écrit grâce à un système de feuilles de papier rouge qui tombent du plafond. Une sirène qui retentit annonce le début et la fin de la scène de la pièce que les acteurs vont devoir interpréter pour leurs bourreaux. Mais pourquoi leur choix se porte-t-il aussi souvent sur "la scène des voleurs"?
Si le dispositif de départ de "Richard III ou presque..." rappelle "Huis-clos" de Sartre, ou "Nos amis les humains" de Bernard Werber, la mise en abyme du jeu de théâtre dans le théâtre permet à Timothy Daly d'aborder, sous forme d'hommage au plus grand dramaturge anglais, des thèmes comme la mise en scène ou les différents styles de jeu des acteurs.
Dans un second temps, la complicité entre les acteurs tourne à l'affrontement, sous la forme d'un thriller psychologique ou comme dans une émission de télé-réalité. Les extraits qu'interprètent les deux acteurs servent de révélateur à l'âme humaine. Ils prennent alors conscience que leurs rôles entrent en résonance avec les méfaits qui les ont amenés en ce espace coupé du monde.
A vouloir aborder trop de thèmes, aucun ne se détache véritablement. Le propos de Timothy Daly se dilue, perd en efficacité. Le spectateur se concentre alors plus sur la forme que sur le fond de la pièce.
La scène sur laquelle les acteurs jouent les scènes de Shakespeare, conçue par Jean-Pierre Benzekri, est un plateau de verre éclairé par en-dessous. La mise en scène d'Isabelle Starkier déborde d'inventions et réserve de beaux effets, comme le début et la fin de chaque scène que les prisonniers doivent interpréter qui voit le plateau nimbé d'une fantomatique lumière rouge. Effet qui rappelle, là encore, que "Richard III" est hanté par les morts qui ont jalonné son accession au trône.
Les lumières de Bertrand Llorca et l'habillage sonore de Michel Bertier viennent souligner, avec force et élégance, les intentions de la mise en scène. Quant à Daniel Jean et Pierre-Yves le Louarn, leur jeu se complète efficacement, autant comme personnages enfermés ensemble que comme acteurs de Shakespeare.
Mais les mots les mieux adaptés pour parler de cette pièce se trouvent dans l'œuvre de Shakespeare : "Le monde entier est un théâtre, et tous, hommes et femmes, n'en sont que les acteurs. Et notre vie durant nous jouons plusieurs rôles."*
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