Pour le début de la saison 2010-2011, la Maison Européenne de la Photographie a sélectionné ses expositions autour de deux thématiques, la mode et le luxe et le portrait.
Pour le portrait, deux photographes de la même génération, tous deux nés au début des années 60, décliné dans deux registres aux antipodes l'un de l'autre : l'autoportrait fictionnel avec la japonaise Kimiko Yoshida et la photographie de genre avec le néerlandais Koos Breukel.
Pour la première exposition monographique qui lui est consacrée sous le titre "Faire face", les commissaires Elisabeth Nora, chargée des acquisitions à la MEP, et Willem Van Zoetendaal, éditeur et galeriste néerlandais, ont sélectionné un florilège de photographies issues de différentes séries réalisées par l'artiste.
De "The Wretched Skin" datant de 1996 à "Cosmetic view", sur les porteurs de prothèses oculaires dont un portrait a été retenu pour le visuel de l'affiche, publié en 2005, Koos Breukel est fort de la conviction que "l’art tente de traduire l’insoutenable, l’horreur de l’existence humaine, en une forme ou une autre de beauté".
Faire face : une photographie humaniste
Koos Breukel oeuvre dans un des registres prépondérants dans la photographie néerlandaise avec ses portraits d'anonymes ou d'artistes, en grands formats quasiment tous en noir & blanc, dont le traitement de la lumière et du contraste évoque, inéluctablement,
la manière héritée de l'âge d'or de la peinture flamande.
Des hommes et des femmes qui, pour la plupart, figurent parmi ceux que la vie n'a épargné, dans leur chair ou dans leur âme, qui figurent dans une galerie de portraits que Jean-Luc Monterosso, directeur de la MEP, qualifie de "galerie de portraits dont la principale vertu est d’illustrer une résistance : celle de l’homme confronté au douloureux désordre du monde".
Des portraits expressionnistes et psychologiques d'hommes qui ne sont jamais dans la posture mais dans une sorte de dénuement métaphysique, qui, par leur frontalité, accrochent le regard pour transmettre des bribes d'histoires.
Un face à face empathique avec l'altérité qui se veut témoignage mais également, comme le souligne Elisabeth Nora dans le catalogue, une modalité de réintégration de ces individus dans le corps social.
S'agissant des non-anomymes, le visiteur remarquera sans aucun doute le portrait au second degré du photographe hollandais et voyeur patenté de l'intimité féminine Gerard Petrus Fieret dont le visage est couvert d'un béret et le poliptyque saisissant du dos de l'acteur afro-américian Michael Matthews.
A ne pas rater en s'y attardant, car l'homme se laisse rarement "saisir", le diptyque du peintre Lucian Freud dans lequel Koos Breukel a su saisir le regard au moment où ce dernier lâche prise.
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