Pièce musicale écrite par David Lescot, mise en scène par Véronique Bellegarde, avec Jacques Bonnaffé, Virgile Vaudelade,
Olivier Garouste, Philippe Gleizes, David Lescot et
Odja Llorca.
"L'instrument à pression" narre le parcours d'un saxophoniste de jazz. C'est d'abord le souffle qu'il lui faut apprendre à maîtriser. Le professeur, fait aimer l'instrument à son élève, lui apprend à se tenir droit, à coller ses lèvres à l'instrument, à utiliser le ventre pour souffler, mais il le prévient aussi des risques qu'il encoure en jouant du "biniou". Il l'informe des pathologies des instrumentistes à vent, des problèmes de lèvres de Louis Armstrong (le syndrome de Satchmo) ou des dents déchaussés de tel autre musicien. Le monde du jazz ressemble à une cour des miracles, à un big band de gueules cassées.
Jacques Bonnaffé campe un professeur qui donne une impulsion très forte à son élève, Virgile Vaugelade, qu'il entraîne tel un boxeur. Très vite, l'élève vole de ses propres ailes. Il jouera dans des clubs, rencontrera une belle contrebassiste, qui joue manouche et "qui ne lâche rien". Mais l'instrument est une maîtresse exigeante qui réduira à néant sa vie amoureuse, puis l'amènera à faire le vide autour de lui en le poussant à emmener son art vers des expérimentations extrêmes.
Ce spectacle est donc un hommage au jazz et aux musiciens. Une grande place est laissée à l'improvisation, improvisation par les musiciens bien sûr, mais aussi dans les déplacements des acteurs. Le texte de David Lescot dialogue avec la musique, et tout cela prend forme harmonieusement.
La mise en scène de Véronique Bellegarde semble donner des directions plus qu'imposer aux acteurs. Virgile Vaugelade, qui remplace au pied levé Médéric Collignon s'intègre avec aisance à cet ensemble.
Sur scène, des musiciens, dont David Lescot, qui jouent de leur instrument et disent leur texte, des comédiens dont les corps bougent au rythme des airs improvisés par les musiciens et un V-jay, "un joueur d'images" dit le programme, Philippe Gleizes, dont les vidéos sont projetées sur un mur de volutes de fumée. Cette pièce est parcourue d'effets visuels très poétiques, comme lorsque Odja Llorca, dans le rôle de la contrebassiste, assise dos au public, se tient dans une posture qui n'est pas sans rappeler le "Violon d'Ingres" de Man Ray.
Cette pièce a beau être un drame inspiré des fins tragiques de nombreuses légendes du jazz, la présence comique de Jacques Bonnaffé, l'énergie de la musique, le charme d'Odja Llorca, le texte savoureux ("Quand c'est fort, faux et pas en phase, c'est free.") de David Lescot, tout cela participe d'une euphorie qui saisit le spectateur du début à la fin. |