Comédie de Xavier Jaillard avec des textes de Francis Blanche, mise en scène de Jacques Ardouin
Si aujourd’hui Francis Blanche est surtout connu pour ses prestations cinématographiques, excellant dans les rôles grinçants (voir les scènes cultes de films comme celle du bourrepif à l’alcool de patate des Tontons flingueurs), il fût aussi et surtout, non pas un comique, mais un talentueux humoriste.
Humoriste, qui selon la définition classique, est une personne dont la forme d’esprit cherche à mettre en valeur avec drôlerie le caractère ridicule, insolite ou absurde de certains aspects de la réalité et qui dissimule sous un air sérieux une raillerie caustique. Et il a déployé ses talents dans tous les domaines artistiques, cabaret, music-hall, chanson, théâtre, radio (avec les incontournables feuilletons dont "Signé Furax" co-écrit avec Pierre Dac), télévision et cinéma.
Francis Blanche est mort en 1974. Il aura sans doute fallu tout ce temps à Xavier Jaillard pour dépasser la douleur de la perte de l’ami et du complice et partager avec le public d'aujourd'hui un florilège des textes de Francis Blanche. Et ce, non sous forme d'un hommage académique mais en écrivant une pièce intelligente et sensible sur la condition de l'acteur, et plus celle de celui qui fait rire, qui sertit quelques unes des plus belles et des plus intemporelles créations de Francis Blanche.
Musiquette de cirque, applaudissements. Silence. Des coups de brigadier annoncent le début du spectacle…mais non, il y a plus de trois coups car ce sont ceux d’un marteau. C’est le clown qui, à peine sorti de scène, recloue un tapis. L’habit quitté, il se doit d’en finir avec son discours de remerciements pour sa réception à l’ordre de Chevalier des Arts et Lettres, qui a lieu dans les heures qui suivent, qui le conduise à regarder derrière lui.
Seul sur scène, souvent submergé par l'émotion, Xavier Jaillard explore, sans fatuité ni cabotinage, toute la palette des sentiments et des émotions : du sourire au rire, de la raillerie à l'absurde, de la tendresse à la résignation.
Parce que c'est le propre du clown, "poêtes, clowns ou pédagoques sont tous des enfants mal guéris" : on rit avec le discours sur l'origine du porte-manteau ("le cintre à zibule") et l'invention du taxi ("la voiture publique"), on sourit et admire les vers de "La tartinette et le camembert" ou de "Le robot et le cornard", on fredonne avec "Le complexe de la truite" ou "La complainte des robinets", on frissonne avec "L'Arlequin poignardé".Et on découvre que l'humour s'accommode bien de la beauté de la langue française.
Alors, n'assassinez pas les clowns quand vous serez devenu grand !