Monologue dramatique écrit par Yannis Ritsos interprété par Marianne Pousseur dans une mise en scène de Enrico Bagnoli.
Après "Ismène", voilà avec "Phèdre", la deuxième partie de "La Trilogie des éléments" conçue par Marianne Pousseur et Enrico Bagnoli à partir de textes de Yannis Ritsos.
Si la poésie lyrique, et parfois ésotérique, de l'auteur grec moderne paraissait sombre en s'inspirant du personnage indécis, et il faut le dire, un peu terne d'Ismène, elle reprend des couleurs en s'emparant de Phèdre.
D'ailleurs, contrairement à Ismène, ce n'est plus dans une quasi-pénombre que Marianne Pousseur interprète le monologue de Phèdre. A l'eau a succédé le feu, et l'on verra sur scène la grande ombre de l'actrice cette fois en manteau de fourrure et non presque nue, se projeter sur la scène.
Les propos qu'elle tient sont aussi moins tourmentés et torturés. Le discours amoureux est fort et assuré. Sans que l'on sache précisément à qui elle s'adresse si l'on ignore tout de son histoire, on sent qu'elle a la prestance d'une reine, la violence et l'assurance de quelqu'un qui a souffert et sait faire souffrir.
C'est un discours cohérent, structuré, cursif qu'elle prononce et qu'elle destine à l'être aimé. Elle est héroïque au sens premier du terme et tient en haleine son public.
Dès lors, les effets sont moins spectaculaires que dans "Ismène", même si le final rappelle qu'on est dans un théâtre où compte le spectaculaire et la performance.
Si l'on relie les deux œuvres, avant de s'apprêter à voir la fin de la trilogie avec "Ajax", se dessine un chemin où la femme assise s'est relevée, a quitté la soumission aqueuse pour se saisir du feu ardent. Connaîtra-t-elle un sort encore meilleur ou se soumettra-t-elle au guerrier Ajax ?
Reste que cette seconde partie, plus abordable, confirme les qualités décrites dans "Ismène", avec en point d'orgue l'impeccable prestation de Marianne Pousseur.
On mesure aussi davantage la radicalité du projet d'Enrico Bagnoli et, devant la capacité qu'il a de changer de perspectives en changeant de personnage, on se dit que l'on est sans doute en train de participer à une aventure théâtrale à la fois singulière et marquante. |