"The universe is the body of a beast, / Stretching out and playing / For you and me" Threshold of Light
Certains musiciens semblent être incapables de se reposer longtemps et donnent l’impression d’avoir toujours quelque chose à dire. Parfois pour le pire, parfois pour l’anecdotique, parfois juste pour montrer qu’ils existent encore, parfois pour le meilleur.
Pour Ben Chasny, le musicien qui se cache derrière Six Organs of Admittance, il faut avouer que c’est souvent pour le meilleur. Depuis 1998, Chasny a eu une production prolifique (quelque chose comme 31 disques en comptant les albums, les compilations, les EPs), sortant un enregistrement de Six Organs of Admittance environ tous les ans, avant de ralentir (tout est relatif) pour se concentrer sur son fascinant projet Hexadic en 2015, en écrivant deux albums inspirés par le jeu de cartes qu'il s'est lui-même inventé (une méthode de composition basée sur le hasard impliquant un ensemble de cartes à jouer dictant l'approche tonale, rythmique et mélodique des chansons, rappelant un principe déjà initié en son temps par John Cage dans Music of changes en 1951).
Disons le tout de suite, la musique enivrante, les mélodies hypnotiques, un certain psychédélisme, le jeu de guitare en picking, la mélancolie boisée, l’influence du poète Américain Wallace Stevens ou plus importante encore du philosophe et théologien français spécialisé dans les domaines de l'islam, du soufisme et du gnosticisme Henry Corbin (son travail sur l'imagination active commencera à l’influencer à l’époque de Dust And Chimes et perdure toujours), les doux interludes font de ce Burning The Threshold un disque totalement pastoral, hypnotique, mystique et contemplatif. Un disque dans le lequel on aimera se lover, souvent sûrement. Un retour pour le musicien vers quelque chose de plus traditionnel donc, rappelant Dust and Chimes (2000).
Avec ce disque acoustique, Ben Chasny prouve une nouvelle fois qu’avec son talent d’écriture sa musique ne manque jamais de profondeur : "Threshold Of Light" rappelle un baroque Anglais (dans le jeu de guitare et dans les harmonies), "Under Fixed Stars", "Things as they are" et "Threshold of Light" sont comme des chuchotements dans l’obscurité, "Around the Axis", "Adoration Song" lorgnent vers l’impressionnisme alors que "Reservoir" mais surtout le long et intense "Taken By Ascent" lorgnent du côté d’un psychédélisme de velours. Tout doucement, Ben Chasny nous emmène dans son univers entre spiritualité et douceur. Clairement ensorcelant…