Comédie de Carlo Goldoni, mise en scène par Vincent Caire, avec Franck Cadoux, Damien Coden, Gaël Colin, Mahaut D’Arthuys, Cédric Miele, Karine Tabet et Alexandre Tourneur.
Mirandoline, la locanderia (la jolie aubergiste), tient une auberge à Venise. Tous les nobles qui s'arrêtent sous son toit tombent irrémédiablement amoureux d'elle, la courtisent, la couvrent de cadeaux dans l'espoir de la séduire.
Mirandoline connait ses charmes et le pouvoir qu'elle exerce sur les hommes. Elle laisse ses prétendants soupirer d'amour sans jamais cependant leur laisser grand espoir. Or un Chevalier arrive, qui prétend ne pas supporter la compagnie des femmes et se déclare insensible à son charme. Mirandoline n'aura alors cesse, par défi, de tenter de faire tomber le Chevalier dans ses filets.
"La Locanderia" est une des premières héroïnes féministes du théâtre occidental, elle est à la fois femme, donc autre par rapport aux personnages principaux masculins de la pièce, propriétaire de son auberge, et jouant d'égale à égal avec ses nobles courtisans.
Pourtant Carlo Goldoni écrit cette pièce à une époque, le 18ème siècle, où Hegel, dans "Principes de la philosophie du droit", écrivait "La différence qu'il y a entre l'homme et la femme est celle qu'il y a entre l'animal et la plante". Goldoni y décrit la société et les mœurs de son époque, se moquant de nobles ruinés autant que des roturiers qui ont acheté un titre de noblesse, mais aussi dresse le portrait d'une femme forte et indépendante. Dans le rôle de Mirandoline, Karine Tabet joue plus de son charme qu'elle ne tire avantage de ses charmes.Le choix de l'interprète se révèle excellent car son jeu en retenu, énergique mais sans excès, convient aux choix de mise en scène de Vincent Caire, en opposition au jeu plus outré de ses partenaires. Les trois principaux rôles masculins, de par leur écriture, sont plus caricaturaux. Les hommes, dans "La Locanderia" représentent chacun des traits de personnalité fortement marqués : le mysogine, le parvenu, l'avare. Damien Coden, dans le rôle du Chevalier, interprète son texte avec force aplomb.
Cédric Miele et Alexandre Tourneur, dans les rôles du Marquis et du Comte, laissent davantage de champ à l'exagération dans l'esprit de la comédie vénitienne de Goldoni.
La mise en scène de Vincent Caire souligne la modernité de cette pièce classique. Le rythme y est soutenu, presque vaudevillesque. Cependant les portes ne claquent pas puisque seuls les encadrements sont sur scène. Aux costumes classiques répond une installation légère. Vincent Caire met l'accent sur la comédie et le rire, privilégiant la rapidité des déplacements, quitte à parfois faire passer en second plan un texte qui insiste pourtant le narcissisme et l'orgueil démesuré des personnages dans leur vision du sentiment amoureux. C'est donc en privilégiant le rythme et le rire, dans un esprit commedia dell'arte, que la Compagnie des Nomadesques aborde cette pièce majeure de l'oeuvre de Goldoni. |