"There is no future I want to see without you, I just don’t know who I would be without you…"
Sur le papier, ce disque avait de nombreuses raisons de nous déplaire, ou tout du moins d’attiser notre méfiance ou notre scepticisme. D’abord, un univers piano / voix et arrangements ultra light très 70’s déjà extrêmement balisé par les plus grands, l’immense Harry Nilsson en tête mais aussi Randy Newman (ou la réunion des deux avec Nilsson Sings Newman) etc., qu’il faut être capable de transcender.
Ensuite, un pompage (pardon mais quand même) presque en règle des mélodies d’Elton John, des Beatles ("Can We Still Be Friends", "Just a Dream"…), et de John Lennon surtout ("Without You" en est un parfait exemple parmi d’autres). Des enchaînements d’accords I-IV-V-I. Des riffs de batterie entendus des milliards de fois, presque niveau débutant, et donc absolument téléphonés. Un parcours de musicien chaotique (du rock indé FM des débuts à cette formule, il y a un monde). Un son de piano foutraque, les morceaux n’ont clairement pas été enregistrés sur un Fazioli ou un Bösendorfer.
Heureusement, la musique ne se fait pas sur une feuille blanche A4 mais sur du papier avec des portées. Parce qu’il faut l’avouer, ce disque est vraiment pas mal du tout. Il faut dire que cela faisait un petit bout de temps maintenant que nous avions repéré le canadien via d'exquises démos ("Just A Dream", "True Love") à la beauté intemporelle, où le spectre Nilsson / Lennon / Girls était déjà bien présent. Et puis il y a dans cette musique, ces mélodies, une désarmante simplicité (qui cache de belles qualités de songwriting (l'écriture étant au centre de ses préoccupations), une véritable tension émotionnelle avec, on l’imagine, une franche authenticité (son parcours difficile de musicien entre Vancouver et la Californie, le chagrin, la complexité de vivre, le cancer de sa mère…). Des tubes aussi ("Can’t Stop Thinking About you", "How Could You babe", "Without You", "Hollywood", "Can We Still Be Friends") comme s'il en pleuvait… Pour être honnête, il faut également saluer le travail de production de Chet "JR" White (ex Girls) au niveau de la recherche sonore et du choix pas idiot d’arrangements simples et discrets.
Ce Goon se révèle donc un disque langoureux (la seconde partie du disque un peu moins, se rapprochant plus d’un Elliott Smith), sucré à souhait, un peu prévisible parfois mais sincèrement touchant.