Comédie dramatique de Joël Pommerat, mise en scène de Jacques Vincey, avec Cynthia Lee MacQuarrie, Ebi Shankara, Janice Koh, Karen Tan, Pavan J Singh, Tan Shou Chen, Timothy Nga, Umi Kalthum Ismail et Zelda Tatiana Ng. Sous un titre métaphorique s'inspirant de la division intestine de la nation coréenne, Joël Pommerat traite du thème de l'amour dans la multitude de déclinaisons qu'engendre la définition polysémique du dictionnaire depuis l'acte sexuel au sentiment en passant, entre autres, par l'affection et l'amitié.
Composée d'une succession de scènes courtes, la partition mosaïcienne de "La Réunification des deux Corées" ressort à la comédie à sketches qui repose, non sur une approche psychologique ou ontologique, mais sur une série de situations décontextualisées au plan spatio-temporel.
Souvent convenues nonobstant quelques inattendus opus loufoques, elles sont traitées selon un large spectre dramatique, du pathétique au comique, sous la focale du désenchantement et de l'incrédulité quant à l'existence même et, surtout, la pérennité d'un affect qui ne serait qu'un temporaire substitut à la solitude profonde l'homme, voire un mythe.
Le metteur en scène Jacques Vincey s'empare de ce patchwork avec les comédiens de la Compagnie Theaterworks de Singapour qui le dispensent en anglais sur une traduction éclairée de Marc Golberg avec un jeu placé sur le signe de l'humour distancié à l'anglo-saxonne. Le scénographe Dennis Cheok a conçu un dispositif de boite noire comportant au centre un praticable érigé en aire de jeu sur lequel les comédiens, assis alignés à l'arrière, viennent officier qui évoque celui d'un école de théâtre dans laquelle les élèves attendent de passer leur scène. Scandés par des coups de gong qui rappellent celui de la cloche du ring de boxe et la musique d'ascenseur jouée en direct par le guitariste Alexandre Meyer suspendu dans les airs, et placés sous les lumières quasi pommeratiennes de Marie-Christine Soma, les short cuts, portés par le talent époustouflant de la troupe, se succèdent à un rythme soutenu avec une rigueur millimétrée.
Du couple psychotique avec une femme hystérique (Cynthia Lee MacQuarrie) qui engage une baby sitter (Umi Kalthum Ismail) pour se donner l'illusion d'avoir des enfants au mari (Paavan J. Singh) confronté à une épouse alzheimérisée (Karen Tan) et à l'instituteur suspecté de pédophilie (Tan Shou Chen), de la femme qui à la moitié de sa vie ( Zelda Tatiana Ng) divorce enfin d'un homme qu'elle n'a jamais aimé à celle qui part au motif que l'amour ne suffit pas (Janice Koh), du séducteur de toutes les femmes de la famille de sa future épouse (Timothy Nga) au client piégé (Ebi Shankaba).
Et puis, un moment de délicate nostalgique avec la vidéo tournée par Brian Gothong Tan avec les comédiens dans un manège d'auto-tamponneuses et les comédiennes errant dans un centre commercial désert.
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