Viv Albertine est une musicienne et parolière britannique, figure du mouvement punk auquel elle participa avec son groupe The Slits. Dans les années 80, elle mena également une carrière de productrice et de réalisatrice. Après vingt-cinq ans de silence, elle remonte sur scène avec un album solo en 2012. Elle vit aujourd’hui à Londres où elle se consacre à la musique et à l’ecriture. Elle a publié son premier récit, De fringues, de musique et de mecs en 2017 chez Buchet-Chastel et sort son second ouvrage, toujours chez le même éditeur, A jeter sans ouvrir.
Pour son précédent ouvrage, qui vient de sortir en poche chez 10/18, l’auteur a reçu de la presse des retours plutôt élogieux. Nul doute que pour son nouveau livre, les commentaires devraient être de la même veine tant l’auteur continue de nous charmer par son style enlevé.
Après De fringues, de musique et de mecs, Viv Albertine poursuit donc la dissection sauvage de ce qui l’a construite en s’attaquant au monstre sacré que représente la famille. Viv Albertine rentre dans les années 2000, elle est désormais assagie et ses années punk sont maintenant loin derrière elle. Il est temps pour elle de se consacrer à sa fille, à sa carrière et, presque à regret, à des mecs qui en valent rarement la peine.
Lorsque son père meurt, Viv doit aller récupérer les biens qui lui reviennent. Elle découvre alors un curieux journal de bord où il a consigné, avant qu’il ne se sépare de sa femme, le quotidien de la famille. Quelques années plus tard, à la mort de sa mère, elle découvre un mystérieux paquet "A jeter sans ouvrir" : c’est le journal miroir de sa mère, couvrant la même période.
A partir de ce récit de la vie familiale à deux voix, férocement opposées, Viv entreprend un douloureux mais nécessaire périple vers le passé, rouvrant par la même des blessures profondes qui résonnent en puisant écho avec sa vie d’aujourd’hui.
Travailler sur son passé, nous offrir un texte où elle nous parle de sa famille et de sa mère est un moyen pour l’auteur d’aller chercher les racines de ses colères. La féministe qu’elle est s’avère au final être la continuité de son aîné, de sa mère qui bien avant elle l’était, accompagnée d’un profond esprit d’indépendance.
Cette défense de la cause féminine, elle souhaite la transmettre à sa fille et l’ouvrage qu’elle nous propose s’adresse aussi à elle. Ce devoir féministe elle le pousse même à son comble, n’hésitant pas à nous parler de ses poils, de ses diarrhées et aussi de ses envies de péter au lit (sources d’insomnie chez elle), même quand elle est avec un homme.
On retrouve le style enlevé de l’auteur, son honnêteté intellectuelle et ses passages crus jamais vulgaires qui nous rappellent que Viv est avant tout une punk. Elle n’élude rien, ne triche pas et fait preuve d’une grande franchise. Le fait de découvrir ces documents écrits par ses parents lui ont permis de les comprendre, de comprendre leurs attitudes à son égard pour au final lui permettre de les excuser. Sa mère a connu des moments difficiles car elle a connu des violences de la part de son mari. Avec son ouvrage, l'auteur s'adresse aussi à sa fille, à ce qu'elle est aujourd'hui pour elle, ce qu'elle sera demain aussi.
A travers l'histoire qu'elle nous raconte dans A jeter sans ouvrir, Viv Albertine nous dresse un portrait sans concession mais juste de la société occidentale des années 60 à nos jours et un formidable plaidoyer pour les femmes. |