Mercredi 12 septembre, deuxième journée de la dernière semaine du FICG (Festival International de la Chanson de Granby). Ce grand festival est presque devenu un passage obligé pour la jeune scène québécoise. En plus des concerts et du concours de la chanson, le festival permet aux artistes et aux professionnels de différents pays de la francophonie de lier contact afin d'organiser des concerts sur les scènes découverte des festivals des deux côtés de l'Atlantique.
Les vitrines du festival consistent en une succession de showcases d'une demi-heure en vraie condition de live, c'est-à-dire en groupe et version électrique, pour quatre artistes par jour. Ce sont des artistes qui ont déjà sorti un premier disque, voire plusieurs. Les concerts se déroulent dans une église, la United Church of Canada, au coeur de la ville.
Le premier artiste ce jour-là est Sébastien Lacombe. C'est déjà son troisième album en huit années de carrière, Territoires.
De retour d'un séjour de deux années au Sénégal, sa musique folk s'est enrichie de sonorités world. Les accords de guitare sur ses nouvelles chansons font penser à certains titres du dernier album de Frànçois & the Atlas Mountains.
Interprété en trio, avec une basse et un batteur, Sébastien Lacombe offre une musique sensible et généreuse, des chansons aux thématiques adultes tels que l'exil ou ses inquiétudes écologiques et politiques. Son folk world est délicat, sobre, sa prestation lumineuse, sans fards. Sébastien Lacombe un artiste sincère au talent certain nous a offert une magnifique prestation.
Pascal Dufour, le chanteur suivant, a le physique du fils caché de Dave et du blond des Modern Talking. On reconnaît aux choeurs Elizabeth Blouin Brathwaite, la fille de l'animateur télé québécois Normand Brathwaite, l'animateur de "Belle et Bum". Ses chansons sont un mélange de pop-rock FM et de plans guitar hero étrangement décalés dans le lieu de culte où nous nous trouvons. Sa section rythmique est solide, l'ensemble professionnel, mais les compositions, en raison d'un traitement à la légèreté d'une enclume trouve vite ses limites. Dans ce style, il interprètera "Tu veux Trop" et un de ses tubes d'il y a trois ans "Sur le Divan Rouge". "La loi du retour", aux influences soul, termine le showcase de ce chanteur de variété rock au format adapté pour les radios.
C'est ensuite la française Mélissmell qui a été invitée à titre de découverte par le directeur du festival Pierre Fortier. Après l'avoir vue en France, il a décidé de la faire venir au Québec où elle joue donc pour la première fois. Sa voix légèrement éraillée sert des textes où pointe la vulnérabilité. Ecorchée vive, son engagement social et politique ne fait aucun doute, mais ses chansons engagées pèchent parfois par naïveté. Elle chante avec force et conviction. Sa présence sur scène est belle, d'autant que Mélanie attire la lumière. Sa fragilité exacerbée retourne un public pourtant composé presque uniquement de professionnels.
C'est enfin au tour de Benoît Paradis Trio de monter sur scène. Formation de jazz chanté emmenée par un chanteur lunaire aux cheveux fous, les textes sont complètement décalés et loufoques. En plus du piano et de la contrebasse, Benoît Paradis joue du trombone à coulisse. Son chant vire au scat lorsqu'il monte debout sur sa chaise, un pied sur le dossier. "Complètement éparpillé", tel qu'il se décrit, Benoît Paradis a toutes les qualités, musicales et de présence scénique, pour tourner sur des festivals jazz en France. Son univers, proche de Boris Vian et des premiers Henri Salvador (période Henri Cording et les dix années suivantes) a toute les chances de séduire un public qui ne se reconnaît pas dans le jazz vocal lounge qui occupe actuellement l'essentiel de la scène.
Cette première journée des vitrines se termine par une présentation de l'École Nationale de la Chanson de Granby, une école telle qu'on la voit dans le film Fame où les élèves sont encouragés à développer leur univers personnel et apprennent à gérer leur carrière. On retrouve sur scène pour deux titres Francis Faubert, demi-finaliste du festival de Granby en 2010, et déjà aperçu lors de ces mêmes vitrines l'année dernière, et une jeune chanteuse prometteuse Marcie.
Cette journée, aux multiples découvertes, montre que, quel que soit le style, un peu de l'avenir de la chanson francophone se joue à Granby. |