Spectacle conçu et mis en scène par Krzysztof Warlikowski d’après l'oeuvre éponyme d'Homère et des textes de Hanna Krall, avec Mariusz Bonaszewski, Stanis?aw Brudny, Andrzej Chyra, Magdalena Cielecka, Ewa Dalkowska, Bartosz Gelner, Malgorzata Hajewska-Krzysztofik, Jadwiga Jankowska-Cieslak, Wojciech Kalarus, Marek Kalita, Hiroaki Murakami, Maja Ostaszewska, Jasmina Polak, Jacek Poniedzialek, Magdalena Pop?awska, Pawel Tomaszewski et Claude Bardouil. Le titre "L’Odyssée. Une histoire pour Hollywood" borne le spectacle en ce qu'il se réfère à deux textes ordonnés autour du retour de guerre, celui du héros antique d'Homère et d'un rescapé de l'Holocauste grâce à l'action de son épouse dont la romancière Hanna Krall a consigné l'histoire.
Mais, comme indiqué par Krzysztof Warlikowski dans sa note d'intention, il présente "un panorama d’analogies inattendues, un voyage à travers de libres associations qui nous guide de paysages surprenants en constellations de personnages, explorant notre capacité à affronter un nouveau conflit de l’humanité et réactivant nos instincts de survie".
Inscrit dans le Post-War Art et l'obsession mémorielle de la Shoah qui soutiennent nombre de ses créations, cet opus réalisé avec ses fidèles collaborateurs, Piotr Gruszczynski à la dramaturgie et Malgorzata Szczesniak pour la scénographie, et interprété par les émérites comédiens de la troupe du Nowy Teatr dont il assure la direction, se caractérise par sa maîtrise de la composition puzzléique pour, en l'espèce, mettre en scène les fantômes et les morts qui hantent la vie de ceux qui se considèrent comme des survivants.
La partition aborde de nombreux thèmes dont ceux de l'immortalité et de l'amour et avec Krzysztof Warlikowski, les histoires d'amour finissent mal avec l'amour, enfui ou inaccompli.
Ainsi avec des retrouvailles décevantes, à l'instar du retour piteux d'un vieil Ulysse (Stanislaw Brudny) qui tente de se dédouaner des exactions commises lors de sa fameuse épopée face notamment à une Pénélope sidérée (Jadwiga Jankowska-Cieslak) en résonance avec celui du Juif cacochyme Shayek (Mariusz Bonaszewski) tant espéré par une épouse (Ewa Dalkowska) qui ne retrouve plus l'élan amoureux.
De même avec celles bucoliques aux allures de chromo des philosophes Hannah Arendt (Malgorzata Hajewska-Krzysztofik) et Martin Heidegger (Andrzej Chyra) qui prennent un tour comico-surréaliste avec l'intervention hilarante d'un moine tibétain en voyage touristique (Hiroaki Murakami).
Comédie également avec la satire de l'âge d'or du cinéma hollywoodien avec le caricatural trio pressenti pour un projet de film composé de Robert Evans (Marek Kalita), Roman Polanski (Pawel Tomaszewski) et Elisabeth Taylor (Magdalena Cielecka) qui se télescopent avec de puissantes séquences dramatiques relatives à la torture et la convocation du journaliste, écrivain et cinéaste Claude Lanzmann (Wojciech Kalarus).
Dans l'univers glauque créé sur le plateau avec une immense cage mobile, symbolisant l'enfermement mental dans le passé comme la captivité des corps dans les camps militaires, et avec ses codes stylistiques dont l'usage intensif de la vidéo, tant par projection d'images enregistrées que le filmage en direct des scènes dont celles hors champ, Krzysztof Warlikowski poursuit ainsi, à travers une dramaturgie de la fragmentation, son travail d'expérimentation d'hybridation narrative suscitant l'(auto)confrontation du spectateur par d'inconfortables juxtapositions. |