Drame de Ödön von Horváth, mise en scène de Guy Pierre Couleau, avec Nils Öhlund, Carolina Pecheny et Jessica Vedel.
Mort écrasé par la chute d’une branche, en pleine gloire, à Paris, devant le Théâtre Marigny, tel est le destin étrange du grand dramaturge Ödön von Horváth, né à Fiume, port sur la mer de l’Empire Austro-Hongrois…
Don Juan revient de guerre, ou "de la guerre", superbe mais sa patrie défaite (il s’agit autant de l’Autriche-Hongrie, en plein démembrement, que de l’Allemagne vaincue, patrie d’adoption de l’auteur).
Cherchant une femme, plus aimée que toutes les autres, il croit la retrouver dans telle paysanne, infirmière, hôtesse du hasard, séduisant par habitude et morne répétition, observateur implacable de l’ennui qu’il rencontre, héros saillant des sentiments ordinaires, chevalier tragique chevauchant dans un désert de sel, où rien ni personne ne l’attend.
La pièce, offrant tant de beaux rôles féminins, a, par la mise en scène de Guy-Pierre Couleau, été réduite à la confrontation d’un comédien, Don Juan, avec deux femmes qui jouent les rôles de toutes les autres.
Nils Ohlund incarne, avec prestance et détachement, le héros masculin légendaire, parfait, élégant, désabusé face à deux merveilleuses comédiennes, Carolina Pecheny et Jessica Vedel, qui jouent des nuances douloureuses et indignées de leur amour dédaigné.
Malgré un début lent, la situation s’installe, révélant des choix de mise en scène pertinents et fins. Ce "Don Juan" transformé séduit sans peine, étrange spectacle qui porte un monde, assurément. |