Comédie dramatique de Réjean Ducharme, mise en scène de Lorraine Pintal, avec Benoit Landry, Sarah Laurendeau et Louise Marleau. Le texte, adapté du roman éponyme de Réjean Ducharme (chef d'oeuvre de la littérature québecoise publié en 1968) raconte la cavale de Bérénice Einberg, enfant neurasthénique tiraillée entre un père juif distant et une mère catholique qui passe son temps entre sa bouteille de gin et ses aquariums.
Il y a aussi son frère Christian avec qui elle a construit un monde fantasmagorique et entretient une relation faite d'amour et de haine.
Bien sûr, il faut passer l'obstacle de ce texte non spécifiquement destiné au théâtre donc très littéraire et rentrer dans la poésie singulière de Réjean Ducharme.
Celui-ci tarabuste la langue, la lie et la délie pour en faire un matériau étincelant, poli comme un diamant et changeant comme un kaléidoscope. Si l'on y est sensible, on peut être sûr alors de vivre un moment rare.
C'est échevelé et saccadé comme une course de haies, emmené par l'étonnnante Sarah Laurendeau qui porte, aux côtés de Louise Marleau et Benoît Landry, impeccables, la majeure partie du texte sur ses épaules.
Marathonienne d'exception, la comédienne ne laisse entrevoir aucune faiblesse dans un texte fleuve où les mots sortent en cascade et dévalent en flots. Un univers où elle s'embarque de tout son corps et de toute son âme, donnant sens à la moindre phrase.
La mise en scène de Lorraine Pintal, devant un superbe travail au décor de Charles Binamé dont l'illustration colle parfaitement à le poésie de Ducharme, mêle la musique envoyée en direct sur scène par Benoît Landry aux envolées de Bérénice. On y entend aussi Robert Charlebois.
Tout cela confère un charme singulier à "L'Avalée des avalés" qui charrie en permanence de l'émotion à la ronde. C'est fiévreux, dense et profondément poétique ; fou et flamboyant.
Une expérience à vivre pour un texte et une comédienne absolument exceptionnels.
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