Monologue écrit et interprété par Gabriel F. avec Gaspard Liberelle sous la direction artistique de Marco Michelangelo. A une époque où les pavés sont de nouveau descellés, c'est à la plage que le Brésilien Gabriel F. reçoit ses spectateurs. Si l'on n'aime pas faire la guerre, et que l'on préfère boire frais à Saint-Tropez, "Naufragé(s)" est l'idéal apaisé du bobo des villes qui a triomphé du baba des champs.
Pas question alors de raisonner, même si on est le seul à ne pas rire et à applaudir ce qui pourrait passer pour un court spectacle vide et creux, et qui apparaît pour ses ravis épris comme une subtile apologie de la paresse heureuse.
Tout ce qui semblerait une proposition apolitique, voire franchement réactionnaire, en incitant à se retirer sur son petit Aventin, deviendra dès lors le comble de la résistance. Tout ce qu'on soupçonnerait de cynisme, comme l'utilisation d'un quasi esclave sous la forme d'un comparse patenté (Gaspard Liberelle), serait en fait un remède hédoniste à l'ennui et un hymne à l'amitié débarrassée de tout mépris social.
Bref, Gabriel F. serait un artiste sympathique et il ne faudrait pas penser à mal devant quelqu'un qui, à la suite d'Alphonse Allais, suggère que s'il ne parlait pas de lui-même, qui d'autre en parlerait ?
Bulle de savon dans le sable, "Naufragé(s)" de Gabriel F. cache peut-être une critique sociale de l'époque où les pavés sont de nouveau descellés et où le Brésil obscurcit son horizon.
On peut pourtant ne pas voir cette critique et se demander pourquoi tout le monde s'amuse de ces faux-clowns lunaires devant lesquels le plus grognon finit par lâcher prise parce que le jeu n'en vaut jamais la chandelle et que cette heure décontractée ne demande qu'un peu d'indulgence.
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