Comme à son habitude le Musée National de la Renaissance, propose avec "Majolique - La faience italienne au temps des humanistes (1480-1530)", une exposition qui ne se cantonne pas à la simple monstration d'oeuvres d'art.
Organisée avec le concours de la RMN-Grand Palais, la collaboration du Musée du Louvre et les prêts de musées français, britanniques et italiens, elle s'inscrit comme la première exposition organisée en France sur le sujet depuis plusieurs décennies permettant une synthèse des recherches menées sur la céramique italienne.
Les commissaires Thierry Crépin-Leblond, conservateur général du Patrimoine, et directeur du Musée National de la Renaissance, et Françoise Barbe, conservateur au département des Objets d'art du Musée Louvre, ont fait une sélection très serrée des oeuvres présentées de manière à concentrer le propos sur des pièces de premier plan, voire exceptionnelles. afin de soutenir et illustrer efficacement le propos.
La majolique italienne, de la céramique d'apparat à la céramique intellectuelle
Les commissaires de l'exposition ont privilégié une présentation thématique qui permet d'appréhender l'interdépendance de cet art décoratif qu'est la majolique, céramique luxueuse et raffinée caractérisée par son décor coloré avec des oxydes métalliques puis lustré apposé sur un revêtement blanc, qui fut le témoin du goût de son temps avec les évolutions techniques et artistiques caractéristiques du Quattrocento italien.
En effet, entre 1480 et 1530, la période la plus féconde de la production de la majolique voit l'apparition, sur la vaisselle d'apparat, d'un nouveau répertoire décoratif.
Ses sources iconographiques résident dans les thématiques humanistes prisées par la Renaissance et sont également en corrélation avec les grandes découvertes contemporaines tant intellectuelles que techniques.
Celui-ci révèle un un nouveau goût de l’ornement, le décor all'antica, le renouveau du traitement de la figure avec la mode du profil en médaillon qui se retrouve sur les assiettes et les pots à pharmacie, et l'émergence du sujet narratif historié dit "a istoriato".
Ainsi, les fresques murales d'inspiration fantastique du palais impérial de la Rome Antique construit par Néron, la Domus Aurea, dégagé en 1480, vont inspirer un nouveau style de décoration contemporain composé d'arabesques et d'entrelacs et de monstres fantastiques, les grotesques, en rupture avec le vocabulaire décoratif gothique.
L'invention récente de l'imprimerie et de la gravure concourent à la diffusion de textes illustrés et des reproductions d'oeuvres qui constitueront un thésaurus thèmes iconographiques et littéraires.
Dans la continuité des sources littéraires et graphiques du Moyen-Age, l'histoire biblique et romaine est toujours prisée, mais la mythologie gréco-romaine devient la première source d'inspiration du début du 16ème siècle, notamment avec les récits de l'Enéide de Virgile et les Métamorphoses d'Ovide.
Elle se mêle au goût pour l’antique et pour les allégories à connotations morales et vertueuses et parfois satiriques.
Une autre novation réside dans le traitement de la figure humaine.
Celui-ci témoigne non seulement l'influence de l'idéalisation de l'art du portrait sculpté antique mais surtout des novations picturales contemporaines.
Avec l'introduction du naturalisme par Giotto et la recherche de l'expression du caractère et de la personnalité du sujet initié par Piero della Francesca et Donatello, le peintre de majolique privilégie le réalisme et le rendu du modelé même si ces portraits sont davantage typologiques que réels.
La majolique témoigne également de la propension à utiliser des décors héraldiques, armoiries et emblèmes, dont l'utilisation se systématise et correspond à une mode européenne liée à l'affirmation de l'identité.
L'exposition se clôt sur le point d'orgue qui constitue le chef d'oeuvre absolu des débuts de la peinture "a istoriato", le service Correr.
Composé de 17 pièces, dont 6 ont été prêtées par le Musée Correr de Venise, le grand service de table de majolique qui a traversé les siècles est dû au grand maître que fut Nicola da Urbino.
Il illustre de surcroît parfaitement la variété des iconographies de cette période dès lors qu'il comporte outre l'illustration de l'histoire d'Orphée, des scènes mythologiques ("Narcisse et Echo"), bibliques ("Salomon adorant une idole") et allégoriques ("Les quatre saisons").
A savoir que le billet d'entrée à l'exposition valant également pour les collections permanentes qui comportent notamment une section consacrée aux arts du feu, la visite peut être complétée par celle de la collection de majolique du Château d'Ecouen. |