Laurent Violet revient sur la scène parisienne. Il est actuellement à l'affiche du Temple avec un nouveau spectacle à la fois humaniste et décapant.
Nous l'avons rencontré quelques minutes avant la représentation.
Vous jouez actuellement à Paris au Temple. Irez-vous ensuite en province ?
Laurent Violet : Nous avons démarré à la Comédie Le Temple le 3 septembre et nous y serons jusqu'au 19 décembre 2006. Nous jouons 3 soirs par semaine les dimanche, lundi et mardi. Mais les autres jours nous jouons déjà en province.
On dit souvent que le public parisien est différent de celui de province ?
Laurent Violet : La démarche des gens est différente. En province on vient voir un comique pour rigoler. A Paris, on vient voir un comique en disant : "T'es un comique ? Alors fais-nous rigoler !". C'est donc plus difficile à Paris.
Votre spectacle est atypique car il ne rentre pas vraiment dans une catégorie. C'est plutôt une mosaïque.
Laurent Violet : L'idée de mosaïque est vraiment celle de départ. Je voulais faire des sketchs dans plusieurs registres et exploitant plusieurs formes d'humour, du gag de répétition à la brève de comptoir, du sketch classique au sketch avec accessoires pour éviter, d'une part, la monotonie d'un one man show uniforme et, d'autre part, pour que ce soit plus vivant voire interactif avec le public. Ce mélange des genres m'est apparu la forme la plus intéressante à explorer.
On rappelle souvent des difficultés que vous avez rencontrées suite à une émission radio. Ce qui amène la question traditionnelle que l'on pose aux humoristes qui est : "Peut-on rire de tout ?" ?
Laurent Violet : Je pense que l'on peut rire de tout mais à condition de bien le faire surtout quand on aborde des sujets sensibles qui nécessitent du travail au niveau de l'écriture et de la structure de manière à ce que le sketch soit imparable. On ne peut pas lâcher n'importe quelle vanne n'importe quand.
En ce qui concerne l'incident sur France Inter j'ai été mis à pied non pas parce que les juifs avaient râlé mais tout simplement parce que le directeur de Radio France de l'époque, Jean-Marie Cavada, qui nourrissait des ambitions politiques, avait sévi suite à la réception via Matignon d'une lettre de l'Ambassade d'Autriche qui avait bien compris qui était visé dans mes propos sur le fascisme. On se demande d'ailleurs pourquoi il était directeur de Radio France. Maintenant il fait de la politique; tant mieux pour Radio France et tant pis pour la politique !
Par ailleurs je n'ai pas été viré de Radio France puisque j'ai continué pendant deux ans à participer à l'émission d’Yves Lecoq sur France Inter le dimanche matin et Jean Luc Hesse, qui était le directeur des programmes, m'avait dit de ne pas m'inquiéter parce que, de toute manière, Jean-Marie Cavada n'écoutait jamais France Inter.
Le spectacle d'humour a-t-il changé depuis que vous êtes dans le métier ?
Laurent Violet : Cela faisait 10 ans que je n'avais pas joué à Paris puisque mon dernier spectacle datait de 1995 au Dejazet. Ce qui a changé c'est Internet qui a complètement détruit le spectacle car il y a maintenant plein de gens qui peuvent aller voir un spectacle gratuitement avec des invitations. Le public va voir un peu tout et n'importe quoi et il est un peu gavé. Et il y a des gens qui ne veulent pas jouer devant 20 personnes. J'ose le mot, ils n'ont pas de couilles pour jouer devant 20 personnes et donc ça invite à gogo. Cela ressemble un peu à Avignon.
Maintenant au niveau de la qualité, depuis 20 ans que je fais ce métier, il y a toujours eu de bonnes et de mauvaises choses. Il y a toujours eu de la merde, il y en a pour tous les goûts, et la merde a le sien comme dirait ma grand-mère ! Il y a bien évidemment une nouvelle génération sur scène mais quand je vais voir ceux qui pratique un "humour de banlieue" je trouve que c'est un peu répétitif.
Mais cela correspond sans doute à leur génération et je le respecte. Je trouve qu'un effort pourrait être entrepris au niveau des textes surtout quand ce sont des gens qui ont du talent et du charisme. Le stand up avec "j'te balance de la vanne" amorce des choses mais le discours n'est pas souvent développé.
Vous êtes très vigilent pour la qualité des textes ?
Laurent Violet : Au départ je voulais être chanteur et donc écrire des chansons. Quand je démarre un sketch, je reste attaché au fait qu'il y a un début, un milieu et une fin. Que ce soit comme un petit conte, un petit conte de fées, une sorte de parabole. J'ai toujours cela présent à l'esprit pour éviter les dérives ce qui explique par exemple que l'un de mes anciens sketchs sur les handicapés n'avait pas été critiqué tout simplement parce que j'ai la prétention de proposer de sketchs bien construits.
Et deviendrez-vous chanteur ?
Laurent Violet : Je m'entraîne pour le moment avec "Mexico".
Et Laurent Violet attaque la chanson …oui il faut vraiment qu'il s'entraîne (rires).
Avez-vous écrit pour les autres ?
Laurent Violet : Oui, j'ai écris pour Yves Lecoq, Virginie Lemoine, André Lamy.
Votre humour s'exporte bien ?
Laurent Violet : Non, je m'adapte à la tournure d'esprit de celui ou celle qui va interpréter le sketch. Mais il faut qu'au départ celui me demande de lui écrire un sketch ait une idée de ce qu'il veut faire et des thèmes qu'il veut aborder. Dans le cas contraire si on me demande d'écrire des trucs comme pour moi, je refuse.
Et êtes-vous déjà en phase d'écriture de nouveaux sketchs ?
Laurent Violet : Oui.
Faut-il les renouveler souvent ?
Laurent Violet : Il y a les sketchs basés sur l'actualité qu'il faut bien pour réactualiser ou modifier. Pour le reste, j'aime assez l'idée décrire des sketchs intemporels. J'ai tourné pendant 10 ans avec mon spectacle précédent et je suis sûr que si je le ressortais dans 2 ans en disant qu'il s'agit d'un spectacle nouveau…
….tout le monde n'y verrait que du feu ?
Laurent Violet : Exactement ! Cela étant à l'époque je passais sur France Inter ce qui me permettait d'annoncer les spectacles. Aujourd'hui, je ne dispose plus de ce média et donc il faudra innover plus souvent. Cela étant il y a des artistes qui passent dans des cabarets avec toujours les mêmes numéros.
Le cabaret serait une formule qui vous intéresserait ?
Laurent Violet : C'est un autre métier avec, en général, des interventions assez courtes qui doivent être immédiatement percutantes et il faut être vraiment blindé pour jouer alors que le public mange. Je préfère l'idée d'un spectacle d'une heure, une heure et demie qui me permet d'étoffer davantage les sujets qui m'intéressent et aussi de développer un univers. Ce qui n'est pas possible en 20 minutes. Je respecte ceux qui font ce métier. Je pense être un chansonnier mais avec un format plus long et plus de confort. Et je crois en mon spectacle ! |