En biologie, la phagocytose est un processus par lequel certaines cellules entrent à l’intérieur d’autres cellules, les faisant disparaître. Evidemment, le processus est bien plus complexe que ça, mais quand Phagocytose est le titre d’un roman graphique, il est d’usage de s’en battre des rondelles de la biologie…

Mais pas tant que ça, vu que le procédé peut également s’appliquer à tout un tas de comportements humains, comportements eux-mêmes dictés par une société aux habitudes ancrées profondément dans les réactions et motivations personnelles. Marcos Prior & Danide assemblent plusieurs planches d’histoires courtes sur cet album.

Les poings levés de la première de couverture ne laissent aucun doute sur la teneur de Phagocytose : la contestation. L’objet est né d’un ras le bol de la société libérale, selon laquelle l’individu doit rester un égoïste (phallocrate à ses heures). On y est. Capitalisme et socialisme, éternel débat depuis le mec qui philosophait dans un tonneau de bière jusqu’à celui qui zigouillera les méchants de son laser-sabre.

Les graphismes empruntent à tous les genres de la BD, du noir et blanc à l’overdose de couleurs saturées, des interminables monologues aux silences, des polices classiques aux crayonnés de papier, des traits de comics, l’éclectisme défile tout au long des pages, représentant diverses voix pour un même sujet : dénoncer.

Le discours est satirique, il raille l’ensemble de la population houspillée à coups de "sois optimiste, économise, ne t’arrête pas, tourne à droite", pendant que de riches et gras bourgeois s’emplissent la panse de mets dégoulinants.

Un épisode relate l’assassinat du "maillon manquant de la généalogie de l’économie, de la pierre de rosette des finances contemporaines", un type un peu louche en caban à carreaux et verres teintés. Un autre propose une solution à l’excédent humain : "en destiner vingt mille au maintien de l’espèce et [offrir] les cent mille restants à la vente à des personnes fortunées de qualité". C’est donc ça que mangeaient les bourgeois cités plus haut…

Hautement ironique, Phagocytose décrit notre société et ses travers familiers que nous n’avons pas tellement envie de changer, preuve en est des derniers agissements fluos… "La société, elle a que des problèmes, la société, elle a mauvaise haleine"… Levons le poing !